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CRA migrants

Covid-19 : “Maintenir les gens en centre de rétention est illégal”

Depuis le début du confinement, 157 personnes seraient encore retenues dans les centres de rétention administrative (CRA) en France. En pleine épidémie de coronavirus, avocats et associations tirent la sonnette d’alarme. Le 23 mars, cinq organisations ont saisi le Conseil d’État pour exiger la libération de tou·tes les retenu·es. En vain.

Depuis le 17 mars 2020, début du confinement généralisé en France, une centaine de personnes en situation irrégulière continuent de s’entasser dans les centres de rétention administrative (CRA).  “On a rapidement alerté le ministère et la préfecture mais on a eu aucune réponse”, fustige Céline Guyot, responsable du pôle juridique à l’Association service social familial migrants (Assfam). Pour les personnes retenues, le quotidien est devenu un enfer. “On dort à plus de quatre par dortoir, on prend nos douches ensemble. On mange ensemble, tout ça dans des conditions vraiment insalubres”, explique Jean, ancien retenu au CRA de Vincennes (94).

Ce dernier s’inquiète d’une promiscuité trop grande et du non-respect des mesures sanitaires pour faire face à l’épidémie : “J’ai été choqué de voir que les policiers ne prenaient pas de mesures pour notre santé. On n’avait pas de masque, pas de gel hydroalcoolique… Tout cela va à l’encontre des préconisations du gouvernement. C’est incompréhensible.”

Des rétentions illégales

Nayeli Magraner, avocate en droit des étrangers à Paris (75), s’indigne : “On en train de priver de liberté des personnes pour qui nous n’avons aucune mesure d’éloignement.” En temps normal, les personnes retenues dans les CRA sont reconduites à la frontière. Or, avec la pandémie, la France, comme beaucoup d’autres pays, a décidé de les fermer. “Penser que l’on pourra trouver un moyen de conduire monsieur X ou Y vers la Tunisie ou l’Algérie dans ces conditions est irréaliste », ajoute l’avocate. Se pose alors la question de la légalité de ces rétentions. Pour David Rohi, responsable rétention à la Cimade, la loi est claire : “La rétention ne peut être utilisée que dans l’idée d’expulser rapidement les personnes retenues. Seulement, aujourd’hui, ces expulsions ne sont pas possibles. Maintenir les gens dans les CRA est donc illégal.”

Une étape de lutte : la saisie du Conseil d’Etat

Face à l’entêtement des préfectures et à l’absence de réponse des ministères, cinq organisations ont saisi le Conseil d’État ce 23 mars. Elles demandent la mise en liberté de toute personne enfermée dans les CRA. La plus haute juridiction administrative a rejeté cette demande le 27 mars. Elle a considéré que les mesures sanitaires étaient remplies dans ces lieux d’enfermement. Pour l’institution, 157 personnes sont retenues en France, alors que chaque centre a une capacité d’accueil de 1800 places. Ces conditions de rétention ne “portent pas atteinte au droit et au respect de la vie des personnes retenues”, affirme le Conseil d’État.

“Cette décision n’est qu’une étape, explique David Rohi. “Des médias s’intéressent à la question et des parlementaires sont mobilisés pour constater les manquements dans ces centres. La bataille continue.”

Un reportage réalisé par Yoanna Sallese

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