Une ninja aux formes féminines prononcées est-elle forcément sexiste ? Dans les univers de jeux vidéos aux personnages caricaturaux, c’est souvent le cas. Mais pour Fanny Lignon, qui analyse justement notre rapport aux personnages, ce n’est pas si simple. Entretien avec une chercheuse passionnante sur les questions de genre dans les jeux vidéos.
Le temps du Festival international du Journalisme à Couthures-sur-Garonne (47), Radio Parleur et Radio Campus France ont créé une radio éphémère sur le web et dans la région, sur les ondes du 102.2 FM. Dans les allées du festival, sous les vols d’hirondelle, Fanny Lignon, chercheuse spécialiste de l’image, du cinéma et des jeux vidéos, s’est prêtée à nos questions, autour d’un thème : le sexisme dans les jeux vidéos
Les filles remodèlent leurs personnages plus que les garçons
Fanny Lignon a coordonné un ouvrage passionnant il y a 4 ans à peine : Genre et jeu vidéo. Comment les filles s’approprient les personnages, souvent en les remodelant, beaucoup plus que les garçons, comment elles reçoivent aussi les commentaires haineux, les remarques ou le harcèlement sur les forums, comment le sexisme dans les jeux vidéos se déploie .
Fanny Lignon ne parle pas ici des jeux vidéos « pour filles », mais de tous les jeux : FPS (First Person Shooter, jeux dans lesquels on incarne le personnage à la première personne), jeux de combat, jeux d’arcade… “Il ne faut pas confondre sexisme et hyper-sexualisation des personnages. (…) Le problème c’est d’avantage le choix dont disposent les joueurs et joueuses entre les personnages masculins et féminins dans les jeux.” Or d’après Fanny Lignon, dans les jeux de combat par exemple, la proportion globale est de 30% de personnages féminins contre 70% de personnages masculins. Dans les jeux vidéos comme ailleurs, la visibilisation des femmes est donc un enjeu majeur pour déconstruire les clichés.
Sexisme et jeux vidéos : les personnages féminins toujours source de résistances masculinistes
Est-ce que le milieu évolue ? Début juillet, une enquête de PC Gamer renvoyait une image glaçante de Mordhau. Ce jeu multijoueur médiéval cultive une ambiance raciste et sexiste, puisqu’on y joue entre personnages blancs et masculins exclusivement. Pour Fanny Lignon, “faire ça au nom de la ‘réalité historique’ n’a pas de sens. Déjà parce que de récentes études montrent que des femmes pouvaient combattre au Moyen-Âge. Et puis parce qu’il s’agit de divertissement !” Le dernier Wolfenstein a pris le pli : il met en scène deux personnages féminins dans son nouvel Opus, Wolfenstein: Youngblood. Alors, les jeux vidéos créent-ils le sexisme, ou sont-ils le reflet des débats qui existent dans la société ?
Tout l’été, retrouvez les meilleurs moments de l’expérience journalistique et radiophonique de Couthures-sur-Radio, et les rediffusions des podcasts qui ont marqué l’année de Radio Parleur.