Une quinzaine de familles syriennes, soit 71 personnes dont 38 enfants, ont été expulsées le 29 août du logement qu’elles occupaient, rue Raspail à Saint-Denis. Elles survivent depuis dans le jardin public voisin, le square Pierre de Geyter, avec le soutien d’une large coalition de collectifs dionysiens.

Alors que la journée de la rentrée des classes vient de s’achever, lundi 2 septembre, des drapeaux de la République syrienne flottent sur le parvis de la mairie de Saint-Denis, en face de la basilique où sont enterrés des rois de France. Un rassemblement d’une cinquantaine de personnes, composé d’une partie des familles expulsées et de leurs soutiens, discutent en cercle. Ils et elles ont appelé à se réunir devant l’hôtel de ville pour réclamer des solutions pérennes de relogement.

Yahya Al-Abdullah, au centre, dont le sujet de recherche est l’intégration des Syrien·nes, récapitule la situation des familles aux personnes venues en soutien. Photographie Pierre-Olivier Chaput pour Radio Parleur.

Les mésaventures des Syriens à Saint-Denis ne datent pourtant pas d’aujourd’hui. Il y a un an déjà, certains avaient échappé de peu à l’expulsion car aucune solution durable n’existait. Douze enfants avaient pu être scolarisés. Mais cette année, alors que les habitants de cet immeuble rue Raspail sont encore plus nombreux, personne n’a pu y finir l’été. La faute à une procédure lancée il y a deux ans par le bailleur associatif Freha, appartenant au mouvement d’Emmaüs, propriétaire des lieux.

Ce bailleur est pourtant loin d’avoir la maîtrise de son bâtiment. Ce n’est pas lui qui y a installé ces familles et leurs enfants mais un marchand de sommeil, qui leur faisait payer un prix exorbitant – 600 € par mois – pour pouvoir rester dans des appartements insalubres. Le directeur de Freha s’est justifié dans les colonnes du Journal de Saint-Denis, avançant que cette expulsion permettrait à l’avenir que “cet immeuble redevienne un immeuble très social”.

Les familles à la rue, leurs affaires à la benne

L’expulsion n’a toutefois pas échappé à la vigilance des réseaux de solidarité dionysiens. L’information a rapidement circulé et un premier rassemblement est organisé l’après-midi même de l’expulsion. Le premier tract de soutien réunit une très large coalition de signataires : les déclinaisons locales des partis politiques (de la France Insoumise jusqu’à l’Union communiste libertaire), des syndicats (Solidaires, SNUIPP), des groupes de Gilets jaunes locaux, des collectifs luttant pour le droit au logement (DAL, Attiéké-Poterie, etc.). Jusqu’à la Compagnie Jolie Môme, tous font bloc derrière les familles.

Les enseignant·es mobilisé·es ont accroché une banderole sur l’école élémentaire Daniel Sorano de Saint-Denis. Photo DR

Comme ces dernières n’ont eu le temps d’attraper que leurs papiers avant de se faire chasser, elles se sont retrouvées à la rue totalement dépourvues. Leurs affaires personnelles ont fini dans une benne amenée pour l’occasion, avant que l’immeuble ne soit muré pour les empêcher d’y revenir. En plus de s’organiser pour faire pression sur les institutions, les militant·es collectent couvertures, vêtements et duvets ou encore installent des toilettes sèches dans le parc où elles ont trouvé refuge. Au rassemblement, des enseignant·es présent·es promettent d’accrocher dès le lendemain une banderole sur l’école.

Des solutions “vagues et précaires”

Alors que la Mairie ne semble toujours pas être en mesure de proposer une solution globale, certaines familles se sont vues proposer des relogements pour quelques jours, avant un retour à la rue. Des habitats souvent situés loin de Saint-Denis, parfois à des heures de transports en commun. Une non-solution pour celles et ceux installé.e.s dans cette ville et dont les enfants y sont scolarisés. Aussi leurs soutiens réclament une solution collective qui évite l’éclatement plutôt que “des propositions vagues et précaires”.

Une fête de soutien aura lieu le samedi 8 septembre à partir de 18 heures au campement du square de Geyter à Saint-Denis, a annoncé le collectif sur sa page Facebook.