Le mouvement des Gilets Jaunes s’est essoufflé. La dernière cabane du Morbihan vient d’être détruite. Pourtant la colère demeure : la gestion de la crise sanitaire, notamment, est au centre des critiques. Certain·es sortent dans la rue malgré le confinement, comme à Pantin, tandis que d’autres réfléchissent à l’après.
« Personne n’a été prévenu. Ça a été tout cassé comme ça. » Christiane, Gilet Jaune de 68 ans, habite à une dizaine de kilomètres de Caudan. La dernière cabane du Morbihan vient d’y être détruite le 22 avril, en plein confinement. Selon elle, si les Gilets Jaunes avaient été mis·es au courant, ils et elles ne se seraient pas opposé·es au démantèlement. « Simplement, on avait demandé à pouvoir récupérer nos affaires qui étaient à l’intérieur », poursuit la retraitée. Le 16 mars, cette cabane était toujours animée des visites militantes. Elle avait tenu bien plus longtemps que les autres QG de Gilets Jaunes du territoire, démantelés pour la plupart au printemps 2019.
« C’était notre symbole, c’était la dernière qui restait en Bretagne, du moins dans le Morbihan, se souvient-elle. On s’y réunissait pour faire nos banderoles, préparer nos manifs. » Elle se remémore une « ambiance formidable » et reste déterminée : « Les gens se réunirons à nouveau et ça recommencera […] Il y a beaucoup de rancœur dans le cœur des Gilets Jaunes. »
Continuer à lutter
« Des moyens pour l’hôpital, mais pas pour le capital ! » Les slogans ont fusé, le 11 avril et 1er mai dernier. Équipé·es de leurs attestations de sortie d’une heure, des militant·es ont déambulé dans la rue. Au nord-est de Paris, les Gilets Jaunes de Pantin poursuivent leur mobilisation.
Jennifer en fait partie. Elle raconte : « La première manifestation, c’était deux jours après que monsieur Macron soit venu à Pantin. Il a lui même créé un attroupement […] On a décidé de réagir, en respectant les distances de sécurité. On voulait lui dire qu’on oublie pas, qu’on est encore là… et qu’on attend toujours des masques et des tests. »
Thibaut, 24 ans, intègre aussi le groupe local. Il revient sur son 1er mai : « C’est infime, ce n’est que l’écume des choses cette manif. Elle n’incitera pas les gens à sortir, à prendre des risques ou à propager le virus. Qu’il y ait des gens qui, après autant de répression, continuent à proposer autant de créativité dans la forme de lutte, dans le désir de société qu’ils souhaitent, ça donne envie de continuer cette aventure avec les Gilets Jaunes. »
Préparer et penser l’après-confinement
Pour les Gilets Jaunes de Pantin et d’autres des environs, il n’est pas question de mettre le militantisme en suspens. Ils et elles préparent déjà la prochaine Assemblée des Assemblées. Celle-ci aura lieu en Île-de-France. De quoi prouver que le mouvement n’est pas mort, du moins à leurs yeux. D’autres pensent à la reprise des manifestations. C’est le cas de John, Gilet Jaune de Commercy, qui avait participé à la préparation de l’Assemblée des Assemblées de cette ville. Indépendamment du mouvement, il s’est aussi engagé dans les élections municipales au sein d’une liste municipaliste, .
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« Il y a déjà des manifs qui s’annoncent, je pense que je vais aller manifester dès que possible », annonce ce Gilet Jaune de la première heure. Il évoque aussi le risque de contact entre personnes si les forces de l’ordre s’en mêlent : « Ce sont les forces de l’ordre qui nous compressaient, nous nassaient, nous tiraient dessus. En tant que manifestants, on est tout à fait capable de respecter les distances d’un mètre, et les masques on sait les mettre. »
Pour John, les personnes déjà en difficulté seront les grandes perdantes du confinement. Impossible pour lui de laisser le terrain libre à la réforme des retraites lorsque ce dernier sera levé. Il s’inquiète aussi de la société de surveillance, des drones, de cette dystopie arrivant. Cela ne l’empêche pas de rester positif sur les luttes à venir : « Je pense que les AG vont reprendre, pas essentiellement Gilets Jaunes, mais plutôt en mode interlutte. »
Un reportage réalisé par Noan Ecerly. Photo de Une : Noan Ecerly.
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