Quand les queers hackent le mouvement antinucléaire – Épisodes 1 et 2

Un souffle queer ravive les braises du mouvement anti-nucléaire. Le mouvement d’opposition à Cigéo, vaste projet d’enfouissement de déchets nucléaires, est éprouvé par la répression judiciaire et policière. Mais depuis quelques mois, il profite de l’arrivée de militant·es queer. Du 16 au 26 août 2021 s’est d’ailleurs tenu près de Bure le camp des Rayonnantes. Alors que l’avenir du projet se joue actuellement, Radio Parleur vous emmène rencontrer cette nouvelle génération d’opposant·es qui articule queer, féminisme et antinucléaire.

  • Épisode 1 : A quoi ressemble un camp queer, déter et antinucléaire ?
  • Épisode 2 : L’antinucléaire devient-il queer ?

Militer contre un projet nucléaire, c’est s’attaquer à un gros morceau. Face à une industrie dont la viabilité est peu -voire jamais- remise en question dans les plus hautes sphères de l’État, militer signifie s’exposer à des poursuites judiciaires et à une pression policière de tous les instants. Cette réalité, c’est celle que les militant‧es antinucléaires rencontrent à Bure depuis 25 ans d’opposition au projet de stockage nucléaire Cigéo.

Le camp s’est installé sur le site de l’ancienne gare de Luméville-en-Ornois, le long de la voie de chemin de fer désaffectée. Elle est destinée à être restaurée pour convoyer pendant 100 ans les convois de déchets radioactifs stockés à Cigéo. Crédit : Les Rayonnantes, à Bure

Leur dernière mobilisation, les 1, 2 et 3 juin dernier, avait pour moteur le procès de 8 d’entre elles et eux pour « association de malfaiteurs ». L’audience a mis en lumière les moyens d’une ampleur conséquente, aux allures d’antiterrorisme, dont a bénéficié l’enquête. Pourtant les chefs d’accusation restent maigres. Partant de faits de vandalisme, le procureur a finit par reprocher aux militant·es l’organisation d’une manifestation non-déclarée.

Des ateliers, discussions ou événements ponctuent la journée des quelques centaines de militant‧es présent‧es sur le camp. Crédit : Les Rayonnantes, à Bure.

La joie, le soin, la solidarité et l’inclusivité au cœur de la lutte

Dans ce contexte, le collectif répondent par la joie, la solidarité et l’accueil. En effet, une petite révolution souffle dans le vallon où s’est installé pour 10 jours le camp des Rayonnantes. Sur le site de l’ancienne gare de Luméville-en-Ornois, une kyrielle de chapiteaux, tentes et caravanes multicolores parsèment l’espace du camp. L’idée est de créer des espaces où chacun‧e peut trouver sa place.

Le milieu antinucléaire a longtemps pâti d’une image viriliste au regard du rapport de force qu’il engage avec le pouvoir. Mais la métamorphose qui a lieu ces dernières années est  spectaculaire. Les militant·es queer présent‧es dans le mouvement ont pris la main sur l’organisation, et rendent centrales les thématiques du soin, de la fête et de l’expression de son identité.

Prendre conscience de la violence qu’on peut porter

Anna, militante antinucléaire depuis quelques années et présente depuis le début du camp rappelle : « on est toujours l’oppresseur ou l’oppresseuse de quelqu’un ». Les dynamiques de domination, de marginalisation, d’oppression présentes au sein de la société se rejouent nécessairement dans ces lieux militants : l’objectif du camp est de leur donner le moins d’espace possible. On parle ainsi de transformer des espaces « confrontants » pour les personnes opprimées en espace « bienveillants ». Pour cela, le camp dispose de nombreux espaces en mixité choisie, pour les personnes non-blanches, non-valides, ou encore des espaces sans hommes cisgenres comme le camping « MINT » pour « meufs, intersexes, non-binaires, trans ».


Sur le même thème, retrouvez notre émission avec Politis et Basta ! : Bure : combat historique contre les déchets nucléaires – Penser les luttes


Prendre soin y est un principe cardinal. Un camp autogéré, c’est épuisant d’organisation : deux-cent personnes sont nécessaires quotidiennement pour accomplir les tâches nécessaires à la vie collective. Il est donc nécessaire de mettre en place des mécanismes permettant la répartition de cette fatigue et son expression. On croise sur le camp les panneaux de l’espace écoute, avec un numéro à appeler et des permanences proposées où chacun‧e pourra trouver une oreille attentive et bienveillante. Des ateliers, des stands, de multiples espaces de fête ou de repos, d’écoute ou de silence. Et au milieu de tout ça, des questions que l’on se pose et auxquelles on tente de répondre ensemble.

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Un reportage de Violette Voldoire et Martin Duffaut. Photo de Une : Les Rayonnantes. 

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