“Plein le dos” est jaune fluo, comme les Gilets Jaunes. La revue est née avec le mouvement il y a près d’un an, et publie méthodiquement les messages drôles, politiques, où révoltés griffonnés sur les chasubles. Entretien avec Malick du collectif sur la genèse de ce projet artistique et militant.

Cet entretien a été réalisé par des journalistes non-professionnels, dans le cadre d’un atelier d’éducation aux médias, le vendredi 13 septembre sur le stand Ensemble! à la Fête de l’Humanité. Cet atelier était encadré bénévolement par Romane Salahun et l’association “La Porte à Côté.”

“Pour une mémoire populaire, la rue contre le mépris”

Le sous-titre de la revue trace une ligne éditoriale radicale et militante. Malick, membre du collectif, précise qu’il s’agit bien “d’apporter un nouveau discours sur les Gilets Jaunes.” Comme la plupart des militant・e・s plutôt classé・e・s à gauche, il regarde le mouvement d’un oeil sceptique. “Au début, je pensais que les Gilets Jaunes étaient un concentré de fachos.” Il s’y rend quand même, poussé par les revendications, très proches des sujets qui le touchent. “C’est en participant aux manifs et en croisant mes infos que j’ai compris que ce mouvement n’était pas ce que je pensais.

Le discours propagé par un certain nombre de médias est négatif, surtout au début.” Les militant・e・s qui dès l’Acte 1, vont fonder le collectif, ont en tête de changer de braquet. Les Gilets et leurs messages racontent la vie chère, les fins de mois avant le 15, la souffrance, la solitude et la colère. “Si 99% des dos de Gilets Jaunes portaient des messages antisémites par exemple, on aurait pu dire que ce mouvement l’était. Mais ça n’est pas ce que l’on voit.” Des messages écologistes, pour la justice fiscale et sociale, pour un accueil digne des exilé・e・s, prouvent à Malick que Plein le dos “devait contrecarrer le discours ambiant”.

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Dès l’Acte 1, on avait assez de photos pour éditer un magazine

Dessinés, barbouillés, calligraphiés, les Gilets Jaunes méthodiquement réassemblés par le Plein le dos dressent une cartographie de cette quasi année pleine de mouvement social. “Où est Steve ?” “Regarde ta Rolex, c’est l’heure de la Révolution”, “Le Gaulois réfractaire t’emmerde”, “Entre vous et la rue, y’a plus que les CRS”, “Ne taxons pas le peuple, taxons la finance”… Photographiés par des amateurs-trices et des pros, les dos de Gilets Jaunes ne portent pas d’insignes ni de flocages partisans. “Même en manif, il faut cuisiner les gens pour savoir s’ils sont d’un parti ou pas,” sourit Malick.

Présent・e・s sur le terrain depuis l’Acte 1, les membres du collectif accumulent rapidement de quoi imprimer un petit journal. L’objectif militant n’est pas seulement de visibiliser le mouvement. “Une fois que le journal est imprimé, on le distribue en manifestation et l’argent est reversé aux personnes victimes de répression policière en manifestation,” explique Malick. Le collectif participe à chaque acte parisien, encore aujourd’hui. “le mouvement ne s’est jamais arrêté. Si les rangs se sont clairsemé, c’est surtout à cause de la répression, économique et policière.”