“Petit Jean” est street médic. Depuis le 15 août 2019, il est en grève de la faim à Genève pour dénoncer les violences policières contre les Gilets Jaunes. Il demande à être reçu par Emmanuel Macron et par l’ONU. Sans réponse pour le moment.

En grève de la faim contre les armes de la police

Jean-Marie, alias Petit Jean, avec sa tenue de médic est allé jusqu’à l’ONU porter des blessé・e・s. “En dictature macroniste, je savais que je n’aurais aucune écoute. J’ai décidé d’aller jusqu’à Genève et de supplier la commissaire aux droits de l’Homme de me recevoir.” En grève de la faim depuis le 15 août, il raconte son combat sur une page Facebook, “Marche Blanche des Médics (Marseille Paris)”.

Les touristes en visite place des Nations s’interrogent sur cet homme en tenue blanche, au béret noir, visiblement affaibli sous son petit parasol orange. Un groupe de visiteurs lituaniens s’approche et demande ce que Petit Jean et ses compagnons Gilets Jaunes font là. “I protest against the violence of the french police. They shoot us, they beat us, they put us in jail. (je me mobilise contre la violence de la police française. Ils nous tirent dessus, ils nous frappent, ils nous mettent en prison).” Il tire David par la manche. “My friend has lost his eye because of those bullets. (mon ami a perdu un oeil à cause de leurs balles)” Le guide lituanien ne manque pas de faire une photo avec Petit Jean, avant de repartir.

L’ONU inquiète de l’usage des armes de la police

Les différents recensements, dont celui du journaliste David Dufresne, établissent que plus de 2500 personnes ont été blessées depuis le 17 novembre 2018. Les forces de l’ordre, toutes catégories confondues, visent Gilets Jaunes, street médics, journalistes et observateurs de l’ONU. Le sujet suscite l’inquiétude de l’institution internationale, qui interpelle la France début mars, par la voix de sa commissaire aux droits de l’Homme, Michelle Bachelet.

Pour autant, l’ancienne présidente du Chili n’a pas ouvert les portes de son bureau à Petit Jean. “Je supplie Madame Bachelet de me recevoir,” clame Jean-Marie. Autour de son cou, une munition de LBD (lanceur de balles de défense). Ce fusil, utilisé avec ardeur depuis le début du mouvement des Gilets Jaunes, est chargé de balles en caoutchouc montées sur une base en plastique dur. L’arme, dite non-létale, cause pourtant des mutilations. Patrice, éborgné le 8 décembre 2018, rappelle que “les munitions qui sont dans ces lanceurs ne sont pas celles fournies par le fabricant. Elles sont plus dures.” Celles fournies par Brügger et Thomet, le fabricant suisse, sont en effet plus molles.

Il n’y a pas que ça”, ajoute Petit Jean. “Les matraques télescopiques, dont personne ne parle, font énormément de dégâts.” Dans sa main, son bâton de pèlerin tremble un peu. Depuis le début d’un périple entamé il y a quelques semaines, Jean-Marie David parle de ce qu’il a vu en soignant les blessé・e・s au sein du mouvement Gilets Jaunes. “Je ne dis pas tout, car je ne veux pas faire peur aux gens et les dissuader de venir en manifestation. Mais ces armes font des blessures atroces.

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Un courrier “difficile à retrouver” du côté de l’Élysée

J’ai envoyé un courrier à l’Élysée. On ne m’a pas répondu.” Jean-Marie David demande la même chose que le professeur Laurent Thinès, neurochirurgien à Besançon. La même chose que le Défenseur des droits, Jacques Toubon. Que le LBD40 et la grenade GLI-F4 cesse d’être employées par les policiers et gendarmes chargés du maintien de l’ordre.

Le G7 a beaucoup mobilisé la Présidence au mois d’août. Contactée, l’Élysée nous répond qu’il faut du temps pour retrouver le courrier de Jean-Marie David “car on en reçoit plusieurs milliers par semaine“. Petit Jean est toujours place des Nations à Genève le jour, hébergé par un Gilet Jaune suisse la nuit. Du côté de l’ONU, un agent du Conseil des Droits de l’Homme s’est déplacé pour discuter avec le médic en grève de la faim. Des rencontres sont prévues sur la question des armes, d’ici début septembre, avec d’autres Gilets Jaunes. “Une possible résolution ne pourrait être prise que par le corps intergouvernemental du Conseil des Droits de l’Homme”, justifie l’institution, dans une réponse écrite à la rédaction.

Sur la page Facebook du médic Petit Jean, les messages se teintent de plus en plus d’inquiétude. Le gréviste de la faim lance un appel depuis la Suisse. “Ce weekend, sur vos ronds-points, ou que vous soyez, appelez l’Élysée, vingt fois par jour (…). Faites des pancartes, soutenez-moi et mettez la pression sur les médias.


Mise à jour le lundi 2 septembre 2019 : L’Élysée nous confirme bien avoir reçu un courrier daté du 11 juillet de la part de Jean-Marie David. “Une réponse lui a été envoyée, manuscrite, à son domicile. Nous n’avons pas connaissance du contenu de cette réponse ni d’une éventuelle prise de rendez-vous avec ce monsieur.


Mise à jour le samedi 7 septembre 2019 : Petit Jean annonce avoir mis un terme à sa grève de la faim la veille. Le consul de France, et l’ambassadeur de France à l’ONU se seraient engagés auprès de lui à faire avancer ses revendications, sauf celle de rencontrer le Président de la République.