Les syndicats représentent-ils un réel contre-pouvoir? Jeudi dernier, lors de l’acte XI de l’intersyndicale contre la réforme des retraites, la réponse collective était claire : syndicats, étudiant·es, travailleur·ses, unissons-nous. Ce sera le retrait ou rien.
Durant des mobilisations de grande ampleur, les syndicats se regardent en chien de faïence avec les militant·es autonomes qui ne savent pas s’iels peuvent leur faire confiance pour durcir le mouvement et ne pas céder au chantage du gouvernement. Il est souvent difficile de dépasser les désaccords ou les querelles. C’est pourtant ce que prône Sylvie, personnelle soignante syndiquée depuis une dizaine d’années : “Le fait d’avoir réussi cette intersyndicale prouve que lorsqu’il y a des mouvements importants, le but c’est de travailler ensemble et d’avoir des idées communes malgré les divergences d’opinion.”
Le mot d’ordre est clair depuis un moment : pas de négociations possibles. C’est ce que les représentant·es syndicaux·les, dont Sophie Binet, nouvelle Secrétaire générale de la CGT, et même Laurent Berger, Secrétaire général de la CFDT, semblent avoir compris. La rencontre tant attendue entre les partenaires sociaux et Elizabeth Borne la veille, qui a tourné au fiasco, aura au moins valu une décision unilatérale : les syndicats ne lâcheront pas jusqu’au retrait.
Le mouvement social massif qui traverse la France depuis maintenant plus de trois mois a vu (re)naître des lieux de politisation et de mobilisation importants. Partout, la lutte s’organise, se structure, et sort du cadre traditionnel instauré par les syndicats. Certes, l’intersyndicale reste une force de frappe majeure permettant de massifier le mouvement les jours de grosse mobilisation et protège les travailleur·ses. Mais lycéen·es, étudiant·es, salarié·es, grévistes, bloqueur·es, etc. ne les attendent pas pour faire émerger des réflexions politiques, agir et se coordonner.
Pour autant, il n’est peut-être pas question de séparer les deux. La tendance de la lutte n’est plus à démontrer : le nerf de la grève, c’est le blocage. La grève des éboueur·ses catalyse une énergie militante et une détermination inédites. Sur les piquets de grève, grévistes, syndicalistes et soutiens extérieurs bloquent main dans la main. Plus largement, beaucoup de militant·es se servent du syndicalisme comme d’un outil politique pour se former, se protéger et tenir dans la durée : “Ma fac c’est Assas, qui n’est historiquement pas une fac de gauche, donc c’est compliqué de s’y politiser, déplore Estelle. Mais un groupe Solidaires s’est créé il n’y a pas longtemps et ça s’est bien structuré : on fait des AG, on bloque…” On ne le répètera jamais assez : l’union fait la force.