Depuis longtemps, la ville apparaît comme le lieu propice à l’épanouissement des jeunes LGBTQIA+. Quand on parle des personnes queer on les visualise là-bas, dans des milieux associatifs ou les réseaux de soirées techno. On ne les imagine pas dans les campagnes. L’existence queer y serait impossible, pétrie de secrets, de peines et d’hostilité. Alors où sont les queers à la campagne ? Sont-iels toustes parti‧es pour la ville ? Virée en Bretagne, à la rencontre d’une ruralité rarement visible.

Départ en Bretagne, là ou « les ploucs » font société. Anna, une femme transgenre bretonnante, Fañch, un papa qui a fait son coming-out tardivement et Ael, non-binaire et aussi parent d’un jeune enfant, nous accueillent chez elleux. À travers de leurs témoignages, on découvre un territoire plein de ressources et bien plus ouvert qu’il n’y paraît. Un moyen de déconstruire l’idée que « pour être queer il faut partir ». 

Faire coexister ses identités

L’illusion de l’anonymat des grandes villes est fantasmé par celleux qui vivent en ruralité. À la campagne, tout le monde se connaît et les rumeurs circulent vite. Les queer y seraient donc plus vulnérables. Ajouter au fait qu’il n’y ai pas d’associations pour les soutenir ou de représentations auxquels se référer, se vivre pleinement paraît difficile pour iels.


Sur le même thème : Une Pride « radicale et anticapitaliste », pour retrouver l’esprit de lutte


Tout au long de notre discussion, Fañch raconte son parcours pour apprendre à faire coexister ses identités. Lui qui s’est découvert « sur le tard » gay, puis bisexuel, a longtemps eu du mal à vivre son identité queer dans le milieu bretonnant. Pourtant, au fil de ses rencontres, il découvre que de nombreux‧euses bretonnant‧es ont dès les années 70 affirmé leur appartenance aux deux communautés. Aujourd’hui, il l’affirme « l’identité bretonne a longtemps été perçue comme incompatible avec l’identité queer, alors que c’est archi faux ! Combien de chanteurs bretons gay a-t-on ? »

Queer ruralités pride maritime Brest
Rassemblement des queers du nord finistère, ruraux.les comme citadin.es, pour la pride maritime de Brest en 2018. Photo : Jef

Se rassembler pour lutter

À Plouaret, petit village des Côtes-d’Armor, nous avons rencontré Anna. Ici les ponts entre milieux bretonnants et queer n’ont pas été durs à faire. « Mon père était policier, chez moi, c’était un peu la gay pride à la gendarmerie ! […] Il y avait des gays, des lesbiennes… » Dans son petit patelin, elle a eu la chance de trouver une communauté queer. Ce n’est pas le cas de Ael qui peine encore à trouver des ami‧es qui partagent son vécu. Le manque de ressources et de réseaux d’entraide empêchent généralement les queers de se retrouver. Créer des lieux d’échange et de partage devient alors essentiel pour structurer cette lutte.

En ce mois des Fiertés, certain‧es queers des campagnes montent dans les grandes villes pour célébrer leurs identités. D’autres restent chez elleux, n’ayant ni les moyens économiques ni les sociabilités pour vivre ce moment. Le rat des champs cessera-t-il un jour d’envier le rat des villes ?

Pour aller plus loin :

Un podcast d’Alicia Arquetoux, Aziliz Peaudecerf et Koupaïa Rault, produit dans le cadre d’un travail pédagogique avec les étudiant·es de l’IUT de journalisme de Lannion. Photo de Une : Koupaïa Rault pour Radio Parleur.