Dimanche 10 novembre, plus de 13.000 personnes ont défilé dans les rues de la capitale pour dénoncer les actes anti-musulmans et réclamer une réaction politique contre l’islamophobie. Une manifestation en présence des réprésentant·es de plusieurs partis de gauche, malgré la polémique qui a opposé des responsables de ces courants politiques toute la semaine dernière.

“On est ici pour dire qu’on se revendique comme de simples citoyens français”, drapeau bleu blanc rouge à la main, Rémi défile ce dimanche dans les rues de la capitale. Autour de lui, plus de 13.000 personnes selon le cabinet de comptage indépendant Occurence et 40.000 selon les organisateurs, se sont déplacées pour participer à cette marche contre l’islamophobie. La plus importante depuis la marche pour l’égalité et contre le racisme en 1983.

À Bayonne, des tirs près d’une mosquée

Retour en arrière. Le 14 octobre une femme voilée est agressée verbalement par Julien Odoul, un élu RN, pendant une séance du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté. Elle est contrainte de quitter les lieux devant l’humiliation qu’elle subit. Elle accompagnait son fils lors d’une sortie scolaire dédiée à découvrir les rouages du fonctionnement démocratique de la République française.

Moins de deux semaines plus tard, ce sont deux hommes de confession musulmane  qui sont visés par des coup de feu, devant leur lieu de culte à Bayonne. L’auteur des tirs est un ancien candidat du Front National devenu aujourd’hui Rassemblement National.

Ces violences interviennent dans un contexte de stigmatisation grandissante de la religion musulmane. Les déclarations du ministre de l’éducation Jean-Michel Blanquer sur le port voile ou encore, sur la chaîne de télévision LCI, les mots d’Yves Thréard directeur adjoint du Figaro affirmant “détester la religion musulmane” ont provoqué la polémique. Ce climat délétère a mené plusieurs associations antiracistes à organiser cette grande mobilisation du 10 novembre avec un seul mot d’ordre : “STOP à l’islamophobie”.

Une manifestante à la manifestations contre les actes antimusulmans à Paris le 10 novembre 2019, "le voile est un faux débat mais un vrai voile sur le débat de nos retraites et nos salaires". Photographie : Sarah Belhadi pour Radio Parleur.
Une manifestante à la marche contre les actes antimusulmans à Paris le 10 novembre 2019, “le voile est un faux débat mais un vrai voile sur le débat de nos retraites et nos salaires”. Photographie : Sarah Belhadi pour Radio Parleur.

Une gauche divisée

Plusieurs personnalités politiques se réclamant de la gauche, ont signé la tribune appelant à cette mobilisation avant d’annoncer qu’ils ne participeraient pas au défilé. Parmi elles, Yannick Jadot d’Europe Écologie Les Verts, François Ruffin et Adrien Quatennens de la France insoumise, ainsi que Fabien Roussel du Parti Communiste. Le Parti Socialiste, lui, figure parmi les grands absents. Le terme même d’islamophobie pose question pour la gauche française. Jean-Luc Mélenchon, leader de la France Insoumise qui était présent à la marche y voit notamment “un obstacle à la tradition anticléricale française”.

Par ailleurs, d’autres renoncements ont été motivés par la présence parmi les signataires de la tribune, du Parti des Indigènes de la République ou encore du Collectif Contre l’Islamophobie en France, réputé proche de la mouvance des Frères Musulmans.

La figure médiatique Gilets Jaunes Priscilla Ludosky a fait part de son refus d’associer son nom aux signataires. Elle ne s’est pas rendue à la marche, contrairement à Jérôme Rodrigues, lequel a été attaqué pour son ralliement à la cause des musulman·es.

 
marche contre islamophobie
Un manifestant derrière sa pancarte lors de la marche contre l islamophobie à Paris le 10 novembre 2019. Photographie : Sarah Belhadi pour Radio Parleur

Les médias mis en cause, le gouvernement pris à parti

Dans le cortège, ce dimanche 10 novembre, beaucoup de manifestant·es pointent la manipulation des médias dans la stigmatisation des musulman·es : “ils incitent à la haine” estime Sihem venue de Clichy. Elle appelle au “réveil national”. Le sociologue Said Bouamama est aussi présent. Il dénonce le “racisme qui s’offre une respectabilité en se cachant derrière la laïcité” et pointe “le faux débat du droit à critiquer l’islam, personne ne l’interdit.” A ses yeux, le débat politique devrait porter sur la lutte contre “les amalgames haineux qui poussent des gens à attaquer des musulmans ou des personnes perçues comme telles”.

Ils et elles sont venus pour témoigner de “la cohabitation bienveillante entre les communautés religieuses qui existent en France” estime Sihem, qui dénonce aussi des “oppositions imaginaires” montées de toutes pièces. Un communiqué des initiateurs de la marche, parmi lesquels le Comité Justice pour Adama, le CCIF et le NPA entre autres, appelle maintenant à des mesures concrètes de la part du gouvernement pour lutter efficacement contre l’islamophobie et rappelle que la loi oblige l’État à lutter de manière égale contre toute les formes de racisme.

Un reportage réalise par Sarah Belhadi

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