En ce dimanche de fête nationale, des centaines de Gilets Jaunes sont parvenus à investir les Champs-Elysées avant, puis après le défilé militaire. Parmi les 175 personnes interpellées par la Police, plusieurs figures du mouvement ont été placées en garde à vue durant plusieurs heures. Ce nouveau coup de projecteur montre que la contestation couve toujours, bien qu’elle peine parfois à se réinventer.

Ils.elles sont venu.es de Paris, Caen ou Amiens. Plusieurs dizaines de groupes de “gilets jaunes” avaient coché le jour symbolique du 14 juillet sur leur calendrier, en faisant régulièrement référence à la Révolution française. Soutenu par 74 000 personnes, l’un des appels lancés sur les réseaux sociaux soulignait notamment que “la fête nationale est historiquement la commémoration de la victoire du peuple face à la royauté”. Délesté.es de leur gilet fluo, certain.e.s ont dissimulé leur chasuble sous leur vêtement ou opté pour des t-shirt jaunes. D’autres sont venus avec des sifflets et de ballons à la couleur du mouvement. Vers dix heures, quelques dizaines de manifestant.e.s, disséminé.e.s parmi la foule des spectateurs du défilé militaire, ont d’abord copieusement hué le passage du Président de la République Emmanuel Macron.

Une date symbolique pour une visibilité médiatique

La préfecture de police de Paris avait bien pris un arrêté pour interdire les rassemblements de Gilets Jaunes sur les Champs-Elysées ce week-end. Le périmètre était hautement contrôlé à l’occasion du défilé. Cela n’a pas suffit à les empêcher de manifester. “Le symbole est là, on a voulu être présents pour notre révolution 2019” confie Thierry. Le bras en écharpe, il est venu de Normandie le matin même avec sa compagne. “C’est les vacances, mais les Gilets Jaunes ils ont pas de vacances : alors on laissera pas la possibilité à de Rugy et ses potes d’en prendre” lance-t-il en référence à François De Rugy, ministre de la Transition Écologique actuellement embourbé dans  un scandale sur son train de vie aux frais du contribuable après des révélations du site Médiapart.

Ce dimanche 14 juillet et jusqu’en fin de journée, la police s’est montré régulièrement débordée par un petit millier de personnes peu nombreuses, mais très mobiles et déterminées. Les manifestant.e.s, se fondant facilement dans la masse des anonymes et ressemblant à monsieur et madame tout le monde, faisaient de chacun.e un.e gilet jaune en puissance. Les différents groupes se sont d’abord lancés dans un jeu du chat et de la souris avec les forces de police. Un cortège de plusieurs centaines de personnes, aux cris de “Révolution !” s’est d’abord élancé aux environs de la rue de Ponthieu, pour finalement se disperser vers la place des Ternes en des groupes moins importants. Plusieurs semaines après la charge policière et la disparition de Steve Caniço à Nantes pendant la fête de la musique, des slogans “Où est Steve ?!” était aussi régulièrement audibles aux abords des Champs-Elysées. En matinée et dans l’après-midi, quelques centaines de manifestant.e.s se sont également réuni.es place de la Bastille et devant le Moulin Rouge. Avant d’être dispersés par la police.

A la fois nulle part et partout, désespérant les forces de l’ordre, les Gilets Jaunes sont finalement parvenus à accéder à la place de l’Etoile aux environs de 14h, alors que le haut de l’avenue est rouvert au public. Rapidement, les manifestant.e.s hérissent l’avenue de barricades, composées des barrières installées pour contenir les spectateurs. Ils et elles applaudissent des militaires qui quittent le quartier par l’avenue d’Iena, avant de disparaître parmi les touristes aux premières sommations de la police. Plusieurs dizaines de Gilets Jaunes sont également parvenus devant le Fouquet’s. L’établissement cossue fêtait justement sa réouverture après avoir été saccagé lors de la manifestation du 16 mars dernier. “On veut du homard, du champagne et du caviar !”, ont crié les manifestant.es devant le restaurant très vite protégé par des CRS. Pour le petit millier de Gilets Jaunes présent sur les Champs-Elysées ce dimanche, il ne pouvait décidément pas être question de restauration, seulement de révolution.

 

Un reportage réalisé par Tristan Goldbronn et Viktor Poisson.