Face à une nouvelle baisse du prix de la course, les livreurs de la plateforme de livraisons Deliveroo s’organisent pour résister. Vendredi 12 octobre, ils ont tenté d’occuper le siège parisien de l’entreprise dans l’espoir d’être entendus, sans succès. Une seconde mobilisation est prévue vendredi 19 octobre.

Les prix baissent et la colère monte. Vendredi 12 octobre, une quarantaine de livreurs en colère se sont réunis place de la République à Paris, ainsi que dans une dizaine d’autres villes en France, afin de dénoncer une nouvelle baisse du prix de la course. Début octobre, Deliveroo a décidé unilatéralement de réduire la rémunération des livreurs de 5,30 euros à 4,80 euros la course. De quoi déclencher la colère de ces autoentrepreneurs qui peinent à joindre les deux bouts. « Je vais perdre entre 200 et 300 euros par mois », regrette l’un d’entre eux, qui se fait appeler « Willy Denzey» et préfère garder l’anonymat pour éviter les sanctions, les protestataires étant parfois désactivés de la plateforme sans explications. « Aujourd’hui, nous ne sommes pas seulement 40 personnes mécontentes sur la place de la République. La colère monte dans toute la France avec des actions menées dans des dizaines de villes. Même en Europe, la lutte s’organise », scande Jérôme Pimot, le co-fondateur du CLAP, collectif de défense des livreurs et porte-parole médiatique de leur précarisation.

Les livreurs à vélo, champions du monde de la précarité. Occupation du siège parisien de Deliveroo, octobre 2018. Photographie: Laury-Anne Cholez

L’occupation avortée du siège parisien de Deliveroo

La manifestation se déroulant place de la République à 14 heures n’a pas vraiment d’incidence sur Deliveroo. « Il faut empêcher les gros restos de livrer », propose un livreur. « C’est la seule façon de les faire flancher, toucher au portefeuille », renchérit un suivant. En attendant un éventuel boycott, ils décident d’aller occuper le siège de Deliveroo, à quelques minutes de la place de la République. Devant le 19 rue des Petites Ecuries, dans le 10e arrondissement, une bonne vingtaine d’entre eux réussit à entrer dans l’immeuble et grimpe les escaliers jusqu’au deuxième étage, l’entrée des bureaux de Deliveroo. Ils frappent. Une fois, deux fois, trois fois. S’acharnent un peu. “Attention les gars, on ne casse rien” tempère Jean-Daniel Zamor, le président du CLAP. Edouard, l’un de ses collègues tente un dialogue de sourd à travers la porte, qui reste close. “Allez messieurs, un peu de courage. Nous sommes venus pour discuter d’égal à égal, comme des partenaires commerciaux que nous sommes sensés être”. Pas de réponse. La porte demeurera définitivement fermée. “Ils ont peur de nous ou quoi “, rigole un livreur. L’alarme incendie se déclenche. La petite troupe redescend, espérant pêcher à la sortie l’équipe de Deliveroo. Las, aucun salarié de la plateforme ne quittera l’immeuble. Penauds et déçus, ils déploient une banderole “champion du monde de la précarité” et enflamment un fumigène. Avant de se rendre à l’évidence : aucun dialogue n’est possible avec les responsables de Deliveroo. Tout du moins, pas de cette façon. “Ils nous demandent d’envoyer un mail pour prendre rendez-vous “, explique blasé Jean-Daniel Zamor. “Ils se moquent de nous”, lui rétorque un collègue. Dans un article du journal Le Monde, la direction de Deliveroo a déclaré “Nous dialoguons en permanence avec nos livreurs. Ils n’avaient pas prévenu mais s’ils nous contactent, on répondra”.

En attendant, ils sont plus remontés que jamais. “On ne va pas se laisser faire, car cette baisse des rémunération n’aura jamais de fin. On trouvera toujours un type qui est prêt à traverser tout Paris pour deux euros. On doit se battre contre cela”.

Une nouvelle manifestation est prévue vendredi 19 octobre à Paris, place de la République à 14 heures, pour un départ collectif vers les bureaux de Deliveroo. Espérant cette fois être reçus et entendus par leur direction.