Une délégation française doit visiter aujourd’hui la centrale de Fukushima Daiichi, six ans après son explosion. Une délégation qui contribue à un débat public français dans lequel il est toujours très compliqué de remettre en cause le nucléaire. Radio Parleur vous propose de revenir en images à Bure, petit village de la Meuse qui tente de s’opposer à un projet d’enfouissements de déchets nucléaires radioactifs.

Cette explosion, filmée de loin par les télévisions internationales et diffusée en directe, glace toujours les sangs six ans plus tard. Une rangée de bâtiments blancs, des cheminées qui ressemblent à des tourelles, et soudain, un panache de fumée. Le bâtiment du réacteur n°1 de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi a sauté. Le poison toxique et indélébile se répand, inexorablement. Six ans plus tard, on est encore très loin d’un retour à la normale. Des élus du Nord-Cotentin, des scientifiques, des écologistes, des syndicalistes et des experts du nucléaire réunis en un groupe de travail hétérogène de pros et d’anti-nucléaires, ont assisté aux commémorations de la catastrophe, et doivent rentrer à la fin de la semaine avec des observations susceptibles de faire avancer le débat public.

Le “fleuron nucléaire français” en plein délitement

Depuis la catastrophe nucléaire de Fukushima, les discours politiques sur le nucléaire ont évolué. En Allemagne, au moins. En France, il est toujours compliqué de remettre en question le “fleuron” français, pourtant en plein délitement. C’est ce que tentent les Bures à cuire, un groupe d’opposants au projet d’enfouissement des déchets nucléaires dans le village de Bure, dans la Meuse.

Au coeur de leur combat, deux idées fortes. D’abord, l’enfouissement dit “réversible” de déchets à la demi-vie radioactive de plusieurs milliers d’année serait une pure fiction. Ils militent pour que les déchets restent ou ils sont, dans les vieilles centrales. Par ailleurs, les opposants dénoncent la “poubellisation” de la France. Construire une benne à déchets nucléaires, ce serait surtout une façon pour l’industrie concernée de continuer à faire du nucléaire. Pourquoi en sortir, puisque des poubelles à déchets existeraient ?

A Bure, une lutte qui intéresse de plus en plus

Le combat de ces opposants au projet Cigéo (Centre industriel de stockage géologique) a commencé il y a longtemps, dans les années 2000. Le 18 février dernier, il s’est massifié et près de 700 personnes se sont déplacées pour manifester devant les locaux de l’Andra, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs.

Où en est la lutte ?

Pour les opposants, elle se poursuit sur le plan juridique. Mardi 28 février, le tribunal administratif de Nancy a invalidé la cession du bois Lejuc à l’Andra. Ce bois est occupé par des cabanes construites par les Bures à cuire.

C’est une première victoire qui va permettre aux opposants de gagner du temps, au moins jusqu’à juillet prochain. Une décision qui pointe aussi les zones d’ombres qui entourent ce projet.

Si le tribunal a pris cette décision, c’est parce que l’acte qui cède à l’Andra les parcelles de terrain du bois Lejuc pour y creuser des cheminées d’aération est entaché d’irrégularités. Ce bois appartient à la commune voisine de Bure, Mandres-en-Barrois. Le 2 juillet 2015, à 6h du matin, le conseil municipal du village s’était réuni pour voter à bulletin secret l’échange des 220 ha du bois Lejuc à l’Andra contre d’autres parcelles. Seulement, le tribunal a relevé que la procédure pour voter à bulletin secret nécessite qu’au moins un tiers des conseillers présents en fassent la demande, ce qui n’avait pas été le cas.

Le conseil municipal devra régler cette irrégularité lors de sa prochaine délibération, dans quatre mois.

Un reportage de June Loper & Violette Voldoire