A l’appel du Conseil Démocratique Kurde en France (CDK-F), une importante manifestation s’est tenue samedi 12 octobre à Paris en soutien aux peuples du Rojava contre ce qu’ils qualifient d’agression militaire par la Turquie.
Le rassemblement débute à 14h, place de la République. De nombreuses organisations répondent à l’appel : on peut voir flotter les drapeaux du YPG (les Unités de protection du peuple, branche armée du PYD, Parti de l’union démocratique) à côté de ceux de l’Union Solidaires, d’Alternatives Libertaires, des partis politiques tels que le NPA ou le PCF. Leurs représentant.es prennent part aux prises de parole sur l’imposante tribune installée sur la place. Des pancartes comparant Erdogan à un djihadiste flottent et flambent parfois.
Dimanche 6 octobre, Donald Trump annonce le retrait des troupes américaines stationnées au nord-est de la Syrie. L’occasion d’une offensive militaire souhaitée de longue date par l’armée turque au Rojava. “Une catastrophe totale” pour Mamam Souleymane, professeur émérite de chimie et coordinateur du comité de solidarité pour Afrin, région kurde de l’ouest syrien. Sous couvert de sécuriser sa frontière en installant 2 des 3,6 millions de réfugiés que comptent la Turquie, Erdogan souhaite y réduire à néant les projets de souveraineté et d’indépendance ardemment défendus dans cette région peuplée principalement de Kurdes, mais aussi d’autres minorités ethniques et religieuses (Arabes, Syriaques, Arméniennes, Turkmènes, Assyriennes). “La seule raison pour laquelle Erdogan attaque actuellement le Rojava, c’est parce que nous sommes Kurdes. C’est parce qu’il a peur que nous créons notre propre État. Un jour ça se fera. Le temps nous le dira.” indique Sinane, manifestant kurde.
Un projet “égalitaire, communiste, féministe” attaqué
Pour le président turc, hors de question d’avoir à sa frontière la preuve que des peuples aux cultures différentes puissent coexister en intelligence et sans État. En effet, la révolution engagée depuis plusieurs années dans la région syrienne d’un Kurdistan non-reconnu, tente de concrétiser une société fédérale démocratique, aux valeurs socialistes, écologistes et féministes.”C’est un mouvement révolutionnaire qui n’a jamais eu lieu nulle part dans le monde. C’est une forme de communisme développé à son paroxysme, et c’est ça l’essence de notre vie et ce qu’on défend” rappelle Sinane.
Entre l’inquiétude d’une possible résurgence de Daesh, et la colère de voir les Kurdes abandonnés à leur sort, les prises de parole se succèdent pour rappeler que les YPG ont lourdement contribué à endiguer l’expansion du groupe terroriste en Syrie. “Les Kurdes ont donné leur vie pour exterminer Daesh, […] L’Occident a refusé de reprendre les prisonniers. Oui on va se reprendre Daesh dans la gueule, mais c’est bien fait pour nous” lâche Laurence, manifestante de 53 ans excédée. À la tribune, on souhaite un sursaut de la communauté internationale, et on insiste pour que les unités de protection du peuple ne soient plus considérées comme un groupe terroriste. Selon le CDK-F, au moins 10.000 manifestant.es étaient présent.es au plus fort de la journée.
Un reportage réalisé par Yoann Compagnon