Cette semaine, les expulsions ont repris à la ZAD, engins de chantier à l’appui. Les occupant.es sont furieux, et les naturalistes inquiets. Ils ont publié hier un communiqué pour dénoncer les dégâts de ces opérations militaires sur le bocage fragile. Débris dans les sols, prairies défoncées par les engins et nichées d’oiseau intoxiquées par les gaz lacrymogènes, les scientifiques renvoient la balle à l’Etat, qui accuse les zadistes de nuire à l’environnement avec leurs « habitats dispersés ». Radio Parleur a visité les belles prairies et talus de la zone humide avec Jean-Marie Dréan, botaniste et membre actif de Naturalistes en lutte.
Les gendarmes nuisent à l’écosystème
Notre-Dame-des-Landes, comme son nom l’indique, est une terre de landes. Un bocage de petites prairies enchâssées entre des talus. Un paysage qui remonte au XIXe siècle et qui a été protégé ces cinquante dernières années, parce qu’un certain aéroport devait être construit. « Cette terre est ce que l’on appelle ‘oligotrophe’, ou pauvre en nutriments. Pauvre en nutriment, ça veut dire riche en biodiversité, » explique Jean-Marie Dréan. « En faisant entrer des engins de chantier et des gaz lacrymogène au printemps, au moment de la période de reproduction de la plupart des espèces, les gendarmes nuisent gravement à cet écosystème fragile. »
Un tassement des sols définitif
Plus qu’un tracteur agricole ? « Oui, les tracteurs ne tassent pas autant les sols. Une fois que le sol est tassé, c’est définitif. » D’où la défense d’une paysannerie pratiquée dans la ZAD sans machines surdimensionnées, qui préservent les sols. Les tranchées creusées par les pelleteuses le 9 avril sont impressionnantes, et la boue séchée révèle un paysage de bidonville, jonchés de bassines et de sacs plastiques plus ou moins enfouis. « Ces déchets sont enfoncés dans les sols sur plus d’un mètre. »
Des terres encore à défendre
Le combat de Naturalistes en lutte contre le saccage du bocage dépasse le cadre des opérations militaires : « Ces terres ont besoin de protection contre d’éventuels agriculteurs revenchards, qui vont désormais tenter de se les approprier. » Jean-Marie Dréan n’est pas le seul à décrire les occupant.es de la ZAD comme des gardien.es de ce bocage unique en France. « La biodiversité est un peu partout la même en France, vu qu’on a enrichi les terres avec des engrais. » Planter du maïs enrobé de pesticides ou toute autre semence entrant dans les clous de l’agriculture conventionnelle serait donc synonyme d’un engraissement des sols irréversible. « Nous avons défendu ces terres contre l’aéroport. Il faut désormais les défendre contre une agriculture irrationnelle qui risque de les tuer. » Pour Jean-Marie, cela passe désormais par un projet collectif d’usage des parcelles. L’aéroport est enterré, mais il reste “son monde” agricole, et celui-là attend son tour pour s’emparer du bocage. Les Naturalistes en lutte demandent que des clauses environnementales soient actées avant toute acquisition ou location de terres.