Il·elles ne se battent plus pour leurs emplois mais pour des « conditions de départ décentes ». Les salarié·es de TUI France ont appris lors d’une visioconférence que leur entreprise allait licencier 65% d’entre eux. La société de voyage allemande a lancé un Plan de Sauvegarde de l’Emploi (PSE) en raison de la crise sanitaire.
Le 17 juin dernier, les salarié·es de TUI France sont invité·es à rejoindre une visioconférence organisée par leur employeur. Ils et elles apprennent alors que leur entreprise lance un Plan de Sauvegarde de l’emploi : 583 postes sur les 904 de la filiale française vont être supprimés. La totalité des 65 agences françaises va fermer.
Un choc alors qu’au niveau mondial TUI est le plus grand group de tourisme du monde. C’est aussi le premier voyagiste français. Il possède des agences de voyage, des hôtels, des navires de croisière, des magasins de détail et six compagnies aériennes. « Ça a duré environ 45 minutes. Le PDG s’est exprimé, c’était très froid. Alors certes c’est pas des choses faciles à annoncer mais c’est quand même 65% des personnes qui partent. Ça a été un gros choc », raconte Stéphanie, employée depuis 14 ans dans l’entreprise.
Des subventions pour faire face à la crise
Depuis, les négociations sont en cours entre les syndicats et la direction, non pas pour garder les emplois mais pour améliorer les conditions de départ des employé·es. « Ils proposent le minimum légal. Par exemple, une personne avec 15 ans d’ancienneté repart avec 12 000 euros. C’est indécent. » dénonce Lazare Razkallah, secrétaire du CSE (Comité Social et Économique) de TUI France et représentant CGT.
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Les salarié·es ont d’autant plus de mal à accepter la situation que TUI a reçu plusieurs subventions dans le cadre de la crise sanitaire. Ainsi, l’État allemand a versé 3 milliards d’euros à l’entreprise. La filiale française, elle, a obtenu 10 millions d’euros du CICE (Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi). De plus, elle bénéficie du chômage partiel.
Les TUI France manifestent devant la DIRECTTE pour protester contre les licenciements
Le 22 septembre, à l’appel des syndicats, une cinquantaine de personnes s’étaient réunies devant les bureaux de la DIRECCTE (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi) à Nanterre. « La DIRECCTE a approuvé le PSE de TUI France. Nous sommes là car ils doivent faire pression pour nous aider à obtenir de meilleures conditions de départ », explique Isalia, représentante syndicale du voyagiste en France.
Par ailleurs, les employé·es ont appris que la DIRECCTE avait reconduit leur chômage partiel jusqu’au 31 décembre. « TUI France bénéficie de l’argent public, de l’argent de mes impôts pour licencier six cent d’entre nous. Et ça, c’est scandaleux » souligne Lazare Razkallah.
Une enveloppe de 30 millions d’euros réclamée par les syndicats
Au total, les syndicats réclament une enveloppe de 30 millions d’euros supplémentaire. Ils souhaitent augmenter la durée des congés de reclassements : douze mois pour les moins de 50 ans et 18 pour les autres (contre six et huit mois à l’heure actuelle). La mise en place d’une indemnité de licenciement supra-légale est également en discussion. De plus, ils souhaitent augmenter le budget de formation de 6.000 à 20.000 euros ainsi qu’une prime de 25 à 30.000 euros pour les créations d’entreprises.
De son côté, la direction de TUI France affirme avoir subie des pertes de 1,9 milliards d’euros pour les 9 premiers mois de l’année. Elle annonce aussi une chute de 98% de son chiffre d’affaire au troisième trimestre. L’entreprise estime n’être « pas en mesure de trouver davantage de moyens financiers pour améliorer les conditions de départ et d’accompagnement des salarié·es qui devront quitter l’entreprise. La direction de TUI France le regrette mais nous n’avons pas le choix. La situation du tourisme en général, ainsi que pour TUI, est compliquée car le business n’a pas repris comme nous l’espérions il y a quelques mois. »
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Un reportage de Morgane Moal. Photo de Une : Mopje18 sous licence Wikimedia Commons
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