Alors que la plateforme de livraison de repas Deliveroo vient d’écoper d’une condamnation pour travail dissimulé ce jeudi 6 février, à Paris, le CLAP (Collectif de Livreurs Autonomes Parisiens) lance ce mercredi un appel au boycott pour la Saint-Valentin, afin d’obtenir une réponse aux revendications des livreurs qui dénoncent la précarité grandissante de la profession.
C’est une première en France. La plateforme de livraison de repas Deliveroo a été condamnée par le conseil des prud’hommes de Paris pour travail dissimulé. Cette décision fait suite à la requalification du contrat de prestation de service d’un de ses coursiers en contrat de travail. “Cette condamnation est une bonne nouvelle pour tous les livreurs, ils peuvent se dire que c’est désormais possible de gagner face à Deliveroo”, affirme Maître Kevin Mention lors d’une conférence de presse, ce mercredi. L’avocat au Barreau de Paris a défendu le premier livreur qui a vu son contrat de prestation de service requalifié en contrat de salarié par les prud’hommes.
Une première victoire judiciaire en forme d’espoir
Le 6 février dernier, après quatre années de procédure, la sentence est tombée : la plate-forme de repas est condamnée à verser 30 000 euros au livreur. Tout commence en 2016, lorsqu’un livreur après avoir travaillé 6 mois au sein de l’entreprise décide de l’attaquer en justice pour “salariat déguisé”. “Mon client s’est rendu compte qu’il avait tous les inconvénients d’un salarié, subordination, contrôle des horaires mais sans en avoir les avantages : pas de protection sociale, pas de congé payé” rappelle l’avocat.
Cette accusation de salariat déguisé n’est pas l’apanage de la seule plateforme Deliveroo. D’autres travailleuses et travailleurs en font aussi les frais dans des entreprises comme Uber ou Foodora. “Ce sont des combats qui peuvent se mener sur plusieurs années, mais maintenant que Deliveroo a été condamné une première fois, tout devrait aller plus vite”, assure Maître Kevin Mention.
Invitée par les organisateur.ices de la conférence de presse, Barbara Gomes est assistante parlementaire et docteure en droit, spécialiste des plateformes numériques. “Le fait que Deliveroo ai été condamné alors que l’entreprise est encore en activité va forcément l’obliger à changer ses pratiques”. Cette spécialiste des plateformes numériques insiste sur l’intentionnalité de l’employeur pointée par la justice. “Le délit de travail dissimulé implique le caractère intentionnel dans le comportement de la plateforme”. Une première condamnation qui intervient alors qu’une instance au pénal est également en cours contre la plateforme de livraison.
“La liberté de travailler à Deliveroo est factice”
Une première qui ne satisfait pas pleinement les livreur.ses mobilisé.es contre la précarité de leur statut. “Il arrive que nous puissions travailler seulement 10h par semaine. Deliveroo peut nous sanctionner de ne pas avoir travaillé à telle date peut nous infliger un plafond maximum d’heures très bas. Ce qui nous met en difficulté financière. La liberté de travailler à Deliveroo est très factice”, explique Jérôme Pimot du Collectif des Livreurs Autonomes de Paris (CLAP).
Né en 2017, ce collectif de livreur.ses autonomes veut se transformer en syndicat pour défendre davantage les travailleuses et travailleurs. “Nous souhaitons des réponses concernant la tarification, la distance des courses ou encore la mise en place d’instance de dialogue” détaille Jérôme Pimot, qui reproche un dialogue de sourd avec la plateforme de livraison.
Pour obtenir ces réponses, les livreur.ses du CLAP appellent à une action de blocage de l’usine Deliveroo à Saint-Ouen (93), lors de la Saint-Valentin, ce vendredi 14 février. La date ne doit rien au hasard, il s’agit d’une journée où les commandes sont traditionnellement élevées et les livreurs et livreuses, particulièrement sollicité.es. Le collectif appelle également les consommatrices et consommateurs au boycott de Deliveroo jusqu’à avoir obtenu les réponses attendues.
Un reportage d’Auriane Duroch. Photo de Une : Laury-Anne Cholez.
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