Coline Charpentier est professeure d’histoire et créatrice du compte Instagram “T’as pensé à ?”. Elle met en lumière les situations quotidiennes où les femmes doivent penser à tout, ou presque. En période de confinement, cette charge mentale du quotidien ne s’allège pas, bien au contraire.
La situation de confinement a un effet de “loupe” sur les tâches domestiques pour Coline Charpentier qui a lancé le compte Instagram “T’as pensé à ?”. Les corvées sont toutes rendues visibles par la présence permanente de tous les membres du foyer à la maison. Et les situations personnelles ne sont pas les mêmes : le télétravail change selon les exigences des entreprises. Certaines sont tolérantes envers une situation exceptionnelle, d’autre au contraire exigent plus de rendement en raison de l’absence de trajet du domicile au lieu de travail.
Ce temps de télétravail se superpose avec celui de l’école à la maison. En raison de la continuité pédagogique, les parents doivent aider leurs enfants à suivre les cours à distance. Souvent submergés, ils et elles agissent soit en “bon élève”, soit abandonnent le suivi, non sans “culpabilité” pour la suite scolaire de l’enfant. C’est de toute façon “un vrai casse-tête pour les parents”.
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Ce “casse-tête” incombe le plus souvent à la femme. C’est la charge mentale : le fait de penser à la gestion du foyer en plus de son travail, et donc de toutes les tâches à réaliser. Au quotidien, c’est faire le ménage, la cuisine, les lessives et ranger la maison. Mais la charge mentale s’étend bien plus loin. Elle concerne aussi les émotions des autres membres du foyer, l’équilibre alimentaire, les relations amicales, les courses, le courrier et les papiers administratifs, les enfants et leurs activités, la contraception… Il s’agit de “prévoir les besoins de son foyer dans le temps”.
Répandue dans les milieux féministes, cette notion découle de la sociologie du travail, et des “doubles journées” des femmes. La charge mentale est généralement portée par les femmes, car ce sont elles qui s’occupent encore en majorité des tâches ménagères. La “sphère domestique est bien souvent mise de coté” face à d’autres combats féministes sur l’égalité salariale et les violences faites aux femmes. Pourtant “le combat intime au sein de son couple” porte sur la sexualité et les tâches quotidiennes. Coline Charpentier résume : “L’intime, c’est aussi se poser la question de qui va se retrouver à nettoyer les chaussettes sales.”
La charge mentale à l’heure du confinement fait ressortir les inégalités
Faire prendre conscience à l’autre cette charge mentale reste difficile pour plusieurs raisons. L’une d’entre elles serait que “les normes de l’amour restes très complexes” et empêchent une discussion rationnelle sur le partage des tâches. Il s’agit de déconnecter l’amour et le foyer, afin de se partager les corvées domestiques parce que l’on vit sous le même toit “qu’on s’aime ou pas”. Par ailleurs, les femmes se rajoutent une charge émotionnelle d’explication bienveillante. “Il y a des moment où on a besoin de claquer des portes”, souligne Coline Charpentier.
Pour mieux répartir la charge mentale au sein du foyer en période de confinement, l’important est de “se réunir, se dire les choses et se répartir les tâches”. Coline Charpentier explique que cela permet à chacun de “participer à la vie de son appartement, de là on l’on habite”. En répartissant les responsabilités, on répartit les tâches et les résultats. Et on allège les risques de dispute dans une période bien compliquée.
Entretien réalisé par Sophie Peroy-Gay. Photo de une : Pierre-Olivier Chaput pour Radio Parleur.
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