44eme jour de grève ce samedi 18 janvier. Le mouvement social le plus long en France depuis Mai 68 perdure. Après le retrait (provisoire) de l’âge pivot annoncé par le Premier Ministre Edouard Philippe le 11 janvier, le mobilisation est moindre mais toujours très active. À Lyon comme ailleurs, les grévistes s’installent dans la durée.
Jeudi 16 janvier, 6eme jour de mobilisation intersyndicale, une phrase revient comme un leitmotiv, sur les lèvres des manifestants devant la Manufacture des Tabacs à Lyon dans le VIIIeme arrondissement de la ville. Il faut “S’inscrire dans la durée”. Dans le cortège qui se forme les sourires s’affichent sur les visages. Sous un doux soleil d’hiver au cœur du mois de janvier, l’intersyndicale lyonnaise qui réuni CGT, FO, FSU, Solidaires, CGC, CNT, Unef et UNL rassemble ses troupes. Les fêtes passées, il faut désormais retrouver un second souffle.
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Cheminots, enseignants ou encore infirmiers sont en première ligne bien sûr, mais d’autres professions sont présentes comme les travailleurs des arts du spectacle, les pompiers, les étudiants ou encore les avocats qui les ont rejoint dernièrement. Et le calendrier des mobilisations dans la Capitale des Gaules s’avère chargé avec des mobilisations qui évoluent. Jeudi 22 janvier, une “retraite aux flambeaux” nocturne s’élancera de la gare Part-Dieu en direction du Centre culturel et de la vie associative de Villeurbanne (CCVA).
Entre 6 600 et 16 000 manifestant.e.s selon les chiffres de la police ou des syndicats ont battu.e.s, sans heurts, le pavé jusqu’à la Place Bellecour ce 16 janvier. Deux jours plus tôt, le mardi 14 janvier, ils et elles étaient entre 1 700 et 5 000 personnes. Une mobilisation intersyndicale sans la CFDT qui estime avoir obtenu gain de cause avec le retrait très provisoire de l’âge pivot.
Véritable pierre d’achoppement pour les syndicats dits “réformistes”, se semi-recul a contenté les dirigeant de la CFDT et en particulier le secrétaire général Laurent Berger, mais dans plusieurs secteurs comme à la SNCF et à la RATP, la base ne partage pas le même point de vue.
Présent depuis le 5 décembre, Laurent Aubeleau, secrétaire de la CGT Cheminot pour la région Auvergne Rhone-Alpes, salue ses camarades en tête de cortège. Il pointe les contradictions du gouvernement qui prône l’universalité du régime mais qui a accordé des exceptions pour les pompiers, les policiers, les militaires, les douaniers, les routiers ou encore les pilotes aériens.
L’opinion au bout de 43 jours de grève elle est toujours favorable au mouvement
Il souhaite également mobiliser les salariés du privé. “On sent bien aussi, et ça c’est une grande victoire de la grève depuis le 5 décembre, c’est que petit à petit nos arguments commencent à porter dans l’opinion. Et l’opinion au bout de 44 jours de grève elle est toujours favorable au mouvement et opposée à la réforme à la hauteur de 60%. Le gouvernement il arrive pas à convaincre”, assène Laurent Aubeleau.
Une bataille de l’opinion dont François Ruffin, député FI de la Somme, rappelait les enjeux mercredi 15 janvier dans un live de Médiapart avec d’Olivier Besencenot (NPA) et Marine Tondelier (EELV).
Puissante diatribe de François Ruffin contre le gouvernement« On va avoir un devoir de mémoire de toute cette histoire, quelque soit le résultat final,il ne faudra pas oublier que tout ça s'est fait contre 75% des Français, contre 42 jours de grève,contre les syndicats. Il ne faudra pas oublier ce moment où la tête du pays a choisi de se détacher du corps social »Puissante diatribe de François Ruffin contre le gouvernement dans #MediapartLive !
Publiée par Mediapart sur Mercredi 15 janvier 2020
Plus loin, à côté de la fanfare, François brandit une pancarte en carton : “Les prévisions du gouvernement ne sont pas fiables. Météo France en grève”. Il a déjà dû faire face à des réductions d’effectif, au travail de nuit, à l’augmentation de la charge de travail … Aujourd’hui, il craint pour sa retraite.
Les choix économiques du gouvernement l’inquiète pour l’avenir de la planète. “Comme on travaille sur un domaine qui touche à l’environnement avec le changement climatique et toutes ces problématiques, on a le sentiment que cette financiarisation croissante du monde c’est pas ça qui va permettre de résoudre l’urgence climatique. Ca ça nous parle énormément”, explique François, prévisionniste à Météo France.
Inquiet, il n’en perd pas son sourire pour autant “On pourrait utiliser ce mouvement social pour construire des alternatives. Par exemple sur la consommation ou sur le rapport qu’on a avec nos banques ou nos assurances. En mon fort intérieur je me dis que c’est ça qui permettrait de construire notre futur. Avec des banques qu’on arrive à mieux contrôler, des flux financier qu’on arrive à mieux contrôler pour faire des investissements pour le bien commun et pas forer des puits de pétrole”, espère François.
Camille, professeur au collège Tonkin à Villeurbanne compte 12 jours de grève à son compteur. Elle tient un tract jaune dans la main. Sur le petit bout de papier on voit un dessin : un point levé avec une clef à molette et un autre avec un stylo dans la main pour annoncer une soirée de soutien aux grévistes de tous les secteurs le 23 janvier prochain de 19 à 22 heures.
“La grève ça implique des sacrifices, on le sait tous. Mais on pense que c’est tellement important qu’on préfère y passer des jours de salaire. On est prêt à beaucoup de sacrifices personnels pour garder une société correcte”, affirme t-elle. Nulle doute qu’elle sera présente aux futurs rassemblements.
A Lyon, reportage et photographies réalisées par Tim Buisson. Photo de Une : Tim Buisson.
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