Ils et elles sont journalistes. Marocains, Congolais, Syriens ou Tchadiens, persécuté·es pour avoir fait leur métier dans leurs pays d’origine, ils et elles ont choisi la France pour terre d’accueil. Débutait ainsi pour nombre de ces journalistes en exil un véritable parcours du combattant.
Tout quitter n’a rien de facile. Pourtant, de nombreux journalistes sont contraint·es chaque année de prendre la route de l’exil. Menaces, agressions physiques, prison, viol, tortures, en sont quelques unes des causes. Agés respectivement de 39 et de 36 ans, Hicham Manssouri et GKM sont tous les deux des journalistes africains ayant dû fuir leurs pays d’origine à cause de leur métier.
Un lieu de travail et de vie pour les journalistes exilé·es
Comme une quinzaine de confrères et de consœurs, il et elle ont trouvé refuge à Paris, au cœur du 15e arrondissement. Entre le Quai de Javel et le périphérique qui ceinture Paris intra-muros se trouve une ancienne usine de brosses. Dans cet immeuble, des bureaux, une bibliothèque, une cuisine et 14 chambres. Un lieu de travail, puisque les journalistes contribuent à un média qui leur est dédié, L’œil de la maison des journalistes, mais aussi un lieu de vie.
Dans chacune des chambres vivent des journalistes étrangers et étrangères, qui ont été contraint·es de fuir leur pays pour cause de pressions politiques qui les faisaient craindre pour leur vie. GKM par exemple, a été enlevée par trois hommes et une femme armé·es. “J’ai dénoncé une arrestation abusive de jeunes catholiques. On se trouvait en plein bras de fer entre Joseph Kabila et l’Eglise Catholique, qui demandait son départ, conformément à la constitution.” Pour cet article, elle a subi un simulacre de procès et le harcèlement constant des autorités. “J’ai dû partir pour sauver ma vie.”
Des domaines d’expertise journalistique peu reconnus
Depuis sa création en 2002, la Maison des journalistes a accueilli plus de 400 journalistes exilé·es, majoritairement originaires du Moyen-Orient, d’Afrique centrale et d’Afrique de l’ouest. Financée essentiellement avec des fonds européens, et grâce aux dons des organes de presse, la structure propose aussi un accompagnement administratif. Celui-ci est vital pour obtenir des titres de séjour, où mieux encore, le statut de réfugié. Encore un parcours du combattant, qui peut durer des années.
“Nous essayons d’intégrer les journalistes exilés par le logement, et c’est compliqué,” explique Camille Peyssard-Miqueau, chargée de mission Partenariat et financement. Les cours de français et la découverte du patrimoine et des lieux culturels ne servent pas qu’à tuer le temps, dans l’attente des réponses des différentes administrations. Ils sont souvent une étape cruciale. Comme l’indique la jeune femme, “Travailler dans le journalisme, pour les francophones, c’est déjà dur, mais pour les non-francophones ça l’est encore plus.”
La Maison des journalistes essaie de créer des ponts avec certaines rédactions, notamment France24, et permettre ainsi une reprise d’activité très attendue. Un travail de fourmi, “car les journalistes exilés ont du mal à faire reconnaître leur domaine d’expertise, même sur la région d’où ils sont originaires.”