Justice sociale et justice fiscale, un même combat ? C’était la conviction qui animait 25 000 personnes, à Paris, samedi 8 décembre. Dans le cortège parisien de la troisième marche pour le climat, écolos et Gilets Jaunes ont fait front commun, loin des dispositifs de répression policière.

Les écolos sont des gens patients. Parfois un peu trop. On se demande même comment ils réussissent à garder le moral alors que les marches pour le climat se succèdent, se ressemblent, mais n’aboutissent à aucun changement politique. Les choses pourraient-elle commencer à bouger grâce aux Gilets Jaunes ?

Samedi 8 décembre, près de 25 000 personnes sont descendues dans la rue à Paris pour cette 3e marche pour le climat. “Les petits pas, ça ne suffit pas”, scandaient en cœur les organisateurs et les manifestants, bien conscients qu’il faut aujourd’hui passer à la vitesse supérieure, alors que nos émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter chaque année, au mépris des engagements pris à la COP21 et des discours du “champion de la terre” de l’Elysée.

“Le bon moment pour unir les luttes”

Lisa, militante contre les pesticides, n’a jamais participé aux mobilisations des Gilets Jaunes, mais se dit aujourd’hui solidaire de leur volonté “de changer plus radicalement les choses”. Dans la foule, beaucoup arboraient le désormais célèbre chasuble fluo, pour marcher aux cotés des écolos. “Le climat, l’égalité fiscale, c’est le même combat. C’est le bon moment pour unir les luttes, car l’écologie c’est la solution”, expliquent en chœur quatre Gilets Jaunes. “Mais bon, on a peu de moyens d’agir vraiment”, déplore l’un d’entre eux. “Pas du tout”, lui rétorque son ami, qui boycotte Appel, Nutella, Amazon. “Les consommateurs ont un pouvoir et il faut le prendre. Car c’est nous qui décidons, mais les gens s’en rendent pas compte”.

Forêt de panneaux pendant la marche climat à Paris, décembre 2018. Photo Laury-Anne Cholez pour Radio Parleur

La crainte de la violence

“La glace fond et les pauvres boivent le bouillon”. Michèle, fringante senior, est venue avec sa pancarte marcher pour le climat. Elle aurait bien aimé défiler avec les Gilets Jaunes, mais a été échaudée par les images des violences. “Et puis à mon âge, je ne cours pas assez vite”! Le cortège climat est en effet bien sage, loin, très loin des échauffourées entre les Gilets Jaunes et les CRS, déployés en masse dans toute la capitale pour réprimer dans la violence toute tentative de contestation.

Les écolos auraient pourtant dû les côtoyer de près : le départ originel de la marche ayant été prévu au Trocadéro. Mais face à la “menace”, la Préfecture a demandé aux organisateurs de s’exiler dans l’est de la capitale, entre Nation et République. Un trajet plus classique des mobilisations, voire même une tentative pour mettre des bâtons dans les roues de la convergence des luttes. Mais personne n’est dupe : tous font le lien entre justice sociale et lutte climatique. “Parce que de toute façon, ce sont les riches qui polluent le plus”, s’exclame un homme moustachu en gilet jaune.

Marche Climat à Paris, le samedi 8 décembre 2018. Photographie : Laury-Anne Cholez pour Radio Parleur.

Une marche plus politique qui se radicalise ?

Un petit groupe se serre autour d’un drapeau inconnu : un sablier dans un rond. Symbole du compte à rebours qui menace notre planète. Il s’agit du mouvement Extinction Rebellion, qui s’est fait connaître du grand public en bloquant une partie de Londres en novembre dernier. Ses membres se veulent plus radicaux, ne craignant pas de finir en prison pour leurs actions, tout en prônant la non-violence. “C’est tout à fait encourageant que les mouvements écologistes, qui sont des mouvements bourgeois, concentrés sur des enjeux complexes, parviennent à aller vers les revendications plus sociales”, explique Andeol, tout jeune militant de la branche française d’Extinction Rebellion.

Face à l’urgence réitérée par l’ensemble de la communauté scientifique, face aux bouleversements climatiques qui sont déjà visibles dans notre quotidien, il s’agit aujourd’hui d’aller plus loin que les simples marches, de signer “la fin des discours rose bonbon”. Car il ne nous reste aujourd’hui plus que deux ans pour agir contre le changement climatique.