La proposition de loi prolongeant le délai pour avorter de 12 à 14 semaines arrive le 8 octobre à l’Assemblée nationale. Soutenue par la majorité, la mesure fait face à une opposition de longue date. À Bordeaux, une manifestation pour le droit à l’avortement était organisée le 28 septembre. L’occasion de rappeler qu’un droit n’est jamais acquis.
Mené·es par une batucada, quelques centaines de manifestant·es traversent la ville jusqu’au cinéma Utopia de Bordeaux, où se déroule la projection de Femmes d’Argentine. Un choix qui ne doit rien au hasard : le film retrace justement l’histoire de la lutte pour le droit à l’avortement dans le pays. En cette journée internationale du droit à l’avortement, dans la manifestation, les prises de parole s’enchaînent. Toutes réaffirment la nécessité de continuer à se battre pour le droit à l’IVG, en France comme ailleurs. « C’est un jour de lutte pour toutes les personnes qui n’y ont pas accès, toutes celles qui en meurent, et toutes celles qui en souffrent », insiste Laure, animatrice de prévention au planning familial de Gironde.
Bientôt un allongement du délai légal pour avorter ?
Sur le plan législatif, la loi pourrait bientôt évoluer. Mercredi 30 septembre, les député·es ont donné un premier feu vert à une proposition de loi visant à allonger de 12 à 14 semaines de grossesse le délai légal pour recourir à l’avortement. Le texte est porté par Albane Gaillot, députée du groupe dissident Écologie Démocratie et Solidarité, malgré la protestation des partis de droite. Le 8 octobre, le texte arrivera dans l’hémicycle. Soutenu par la majorité, il a été précédé d’un rapport parlementaire de la délégation aux droits des femmes qui préconisait cette mesure.
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« En France, on a l’une des législations les plus avancées. Pourtant, matériellement, ce n’est pas toujours simple. Il y a de grandes inégalités territoriales. » Également pointée du doigt, la double clause de conscience qui encadre l’avortement. Le personnel médical peut, pour tout acte médical, avoir recours à une clause de conscience. Cependant, il en existe une seconde, spécifique à l’IVG. Laure en est convaincue : « cela contribue à entourer cette acte d’une forme de chape morale ». Une complication de plus pour un droit toujours menacé. Davantage encore lorsque les choix budgétaires et la situation sanitaire dégradent les conditions d’accès à l’IVG.
Une manifestation pour le droit à l’avortement sur fond de tensions locales
« C’était assez jouissif, pour la vieille féministe que je suis, de manifester devant Saint Éloi », s’émeut Annie, militante au planning familial « depuis de nombreuses années. ». En effet, l’édifice est connu dans la ville pour abriter une paroisse traditionnaliste, qui célèbre encore la messe en latin. À Bordeaux, comme dans de nombreuses communes françaises, l’extrême-droite et le planning familial entretiennent des rapports tendus. Des tensions qui virent parfois à l’agression, comme en août dernier. Des membres du groupuscule Bordeaux Nationaliste avaient alors recouvert la façade de l’association de faux sang.
« C’était suite à une avancée du droit. Dans la loi Bioéthique, un amendement prévoit l’ouverture de l’Interruption Médicale de Grossesse (IMG) sans délai, au motif de détresse psycho-sociale. C’était déjà possible en cas de danger pour la santé de la mère ou du nourrisson. C’est une avancée réclamée depuis longtemps. » Les militant·es pour le droit à l’IVG ont donc répondu à cette attaque dans la rue, mais également au tribunal. Annie l’assure : « Nous avons porté plainte, et nous espérons qu’il y aura des suites. »
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Un reportage réalisé par Justine Mascarilla. Photographie de Une : Justine Mascarilla pour Radio Parleur.
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