Hopital manifestations 14 novembre

Mobilisation générale à l’hôpital avant la manifestation du 14 novembre

A la veille du vote du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), le collectif Inter Urgences, initié par des paramédicaux urgentistes, a été rejoint dans la rue ce 29 octobre par le collectif Inter Hôpitaux, animé essentiellement par les médecins. Un prélude en forme de convergence, avant la grande manifestation nationale pour la « défense de l’hôpital » organisée le 14 novembre par les hospitalier⋅es en lutte.


A la veille d’Halloween, les manifestant·es en blouse blanche ont joué la carte de l’ironie amère en formant un cortège macabre. Au son d’une marche funèbre, ils et elles ont défilé au nom de la « mort » de l’hôpital public. Une couronne de fleurs blanches ornée d’une banderole « A notre pauvre budget » ouvre la marche. Quatre soignant·es transportent le cercueil de l’hôpital public où est inscrit leur appel à l’aide : « Urgence vitale ! Ensemble, sauvons l’hôpital public ». A la veille du vote du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), le cortège au départ de Chevaleret (dans le 13e arrondissement de Paris) a fini sa marche au ministère du budget à Bercy. Environ 150 personnels hospitaliers étaient présents pour réclamer en priorité une augmentation des moyens octroyés aux hôpitaux.

Huit mois de mobilisation pour défendre la santé

Depuis le mois de mars, le mouvement ne faiblit pas, et l’unité entre les membres du personnel hospitalier se renforce. « On voit vraiment la parole se délier. Les gens osent dire que ça va pas, qu’ils n’arrivent plus à mener à bien leurs projets ou à faire tourner leurs équipes », explique Aline. « Ils se sentent débordés et ils n’ont plus le sentiment de réussir à faire leur travail correctement. » La quarantaine, cette rhumatologue travaille à l’hôpital Lariboisière, à Paris. « On est parfois un peu désabusés, on a l’impression qu’on est au fond du trou et qu’on aura du mal à remonter la pente… J’espère qu’on sera entendus et surtout, je souhaiterais que l’ensemble de nos concitoyens prenne connaissance de ce débat. Parce que c’est aussi leur santé qui est en jeu. »

 

Hospitaliers en lutte.
Les manifestants espéraient être reçus au ministère du budget par Gérald Darmanin, qui a refusé de les recevoir. Photographie : Lisa Giroldini pour Radio Parleur.

 

Des politiques qui se refilent la patate chaude

Les mesures proposées par la ministre de la Santé Agnès Buzyn n’ont ni satisfait les médecins, ni calmé leur colère. « On espère que l’ONDAM (Objectif national de dépenses d’assurance maladie) va passer à 4 % minimum parce que c’est ce que l’on revendique depuis longtemps. On espère que la mobilisation va s’étendre à tout l’hôpital et en province, voire à la médecine de ville également parce qu’on est tous exsangues et qu’on a tous besoin de se serrer les coudes pour demander une santé qui soit humaine et pas budgétée comme une entreprise », résume Julia, une interne en neurologie. Les manifestant·es espéraient être reçus au ministère du budget par Gérald Darmanin, qui a refusé de les recevoir. « On est assez déçus. Il y a eu des annonces des politiques assez récemment, enfin une considération du problème, et on pensait que dans cette lignée là le ministre allait daigner nous recevoir. Malheureusement cela n’a pas été le cas. (…) Il nous a redirigé vers le ministère de la Santé donc je pense qu’il n’a pas compris que le problème était de son côté… », regrette Julia. Derrière elle, dans le cortège, une sono fait résonner les paroles de la chanteuse Edith Piaf : « Il me dit des mots d’amour, Des mots de tous les jours. » Entre le gouvernement et les hospitalier⋅es en lutte, le divorce est en passe d’être consommé, malgré les déclarations d’amour du chef de l’État. Lundi 28 octobre, sur RTL, Emmanuel Macron s’est adressé aux soignant⋅es mobilisé⋅es : « Une des choses qui me bouleverse le plus, c’est quand je vois nos infirmières, nos aides-soignants, nos médecins qui sont en souffrance au travail. »

 

Hospitalier en lutte
« L’hôpital est dans une situation réanimatoire », alerte Sophie Crozier, neurologue et cofondatrice du mouvement du Collectif Inter Hôpitaux. Photographie : Lisa Giroldini pour Radio Parleur.

 

« L’hôpital est dans une situation réanimatoire » avant la manifestation du 14 novembre

Parvenu·es à Bercy, les manifestant·es ont déposé une dépouille symbolique de l’hôpital public. Les représentant⋅es du Collectif Inter Urgences et Inter Hôpitaux ont lu une lettre ouverte à Gérald Darmanin. « Nous en médecine, si le diagnostic est fait trop tardivement et qu’en plus le traitement n’est pas adapté, la situation se dégrade et c’est ce qu’on observe depuis des années. » Au micro, Sophie Crozier, neurologue et praticienne hospitalière à temps plein à l’hôpital de la Salpêtrière pousse un cri d’alarme : « L’hôpital est dans une situation réanimatoire, on a vraiment besoin d’un geste fort, d’une action forte. » Pour la cofondatrice du Collectif Inter Hôpitaux, l’espoir de maintenir l’hôpital public à flots ne se concrétisera qu’avec un traitement puissant. Certain⋅es cadres présent⋅es dans le cortège souhaitent garder l’anonymat en raison de leur devoir de réserve. Présent⋅es à travers le collectif Inter Hopitaux, nombre de médecins rejoignent ce mardi le mouvement déjà initié par les paramédicaux urgentistes, en mars dernier. Venu avec son mari, également fonctionnaire de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP), une cadre salue la mobilisation des médecins : « C’est quand même des personnels qui n’ont pas l’habitude d’être dans la rue. Il y a toujours une sécurité et une qualité qui font qu’on reste sur le terrain, alors quand on commence à en voir dans la rue, je pense que ça devient inquiétant.

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Après huit mois de mobilisation, cette manifestation symbolique a valeur de « tour de chauffe » avant un rassemblement d’une plus grande ampleur, nationale. Le 14 novembre, la « grande manifestation pour la défense de l’hôpital » aura lieu à Paris. “Ça va être une très grosse journée” assure Aline. “Tout le monde a envie de se mobiliser : médecins, paramédicaux et chef·fes de service. L’hôpital va marcher au ralenti pour permettre à une majorité de manifester.” Cette fois, les collectifs espèrent se faire entendre et recevoir des réponses appropriées, mais aussi fédérer l’ensemble de l’hôpital public, au-delà des seuls services déjà mobilisés. Selon le collectif Inter-Urgences, 269 services étaient toujours en grève le 23 octobre.

Un reportage réalisé par Lisa Giroldini.

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