Le Mouvement de Libération des Femmes (MLF) fête ses 50 ans. Véritable symbole de la deuxième vague féministe qui déferle sur la France dans les années 1970, ses militantes ont indéniablement fait avancer la cause féministe. Un demi-siècle plus tard, qu’en reste-t-il ? Comment la nouvelle vague perçoit-elle ces pionnières ?
Article initialement publié le 7 octobre 2020, republié à l’occasion l’annonce de la sélection de ce podcast pour le festival Longueurs d’ondes 2021, catégorie Petites Ondes.
Nous sommes le 26 août 1970. Neuf femmes s’avancent vers la tombe du Soldat inconnu, sous l’Arc de Triomphe, à Paris. L’une d’entre elles porte une gerbe à la main. Les autres arborent des banderoles où l’on peut lire : « Un homme sur deux est une femme, Il y a plus inconnu que le soldat inconnu, sa femme. » Cette action marque les débuts fracassants du Mouvement de Libération des Femmes.
Cathy Bernheim est l’une de ces neuf militantes : « Déposer une gerbe, c’était ce qu’on faisait tous les 11 novembre pour le Soldat inconnu. Mais jamais on ne parlait du rôle des femmes dans la guerre. De cette façon, on voulait rappeler qu’une société ne fonctionne pas sans femmes. »
« Il y a un refus d’imiter le modèle dit masculin »
De neuf, le mouvement passe alors à plusieurs centaines et milliers de femmes. Le MLF prend une forme inhabituelle : plusieurs petits groupes non-mixtes aux idéologies diverses. « Ce n’est pas une organisation centralisée. Il y a un refus d’imiter le modèle dit masculin, avec des porte-paroles, des représentants, … » explique Christine Bard, historienne spécialiste de l’histoire des femmes.
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Parmi ces groupes, on retrouve celui d’une des co-fondatrices du mouvement, Antoinette Fouque, nommé Psychanalyse et Politique, qualifié d’essentialiste. D’autres, aux tendances marxistes, mêlent lutte des classes et féministe. Les lesbiennes, elles, s’organisent dans d’autres collectifs, comme celui des Gouines Rouges.
Malgré des opinions divergentes, ces femmes dénoncent collectivement les inégalités patriarcales auxquelles elles font face. Elles militent pour le droit à l’avortement (obtenu en 1975). Elles réclament également la gratuité de la contraception et la criminalisation du viol.
50 ans après, que reste-t-il du MLF ?
Ce mouvement va pourtant souffrir de la tentative d’appropriation d’Antoinette Fouque. En 1979, la militante dépose la marque MLF à l’Institut national de la propriété intellectuelle. L’événement jette un froid dans le groupe. Il marque ainsi le début d’un essoufflement du mouvement. « L’objectif n’était pas de durer mais de marquer une rupture. Elles ont obtenu des victoires, notamment celle de l’IVG. Et donc, ce qui avait fédéré les militantes en 1970 semble gagné » ajoute Christine Bard.
Cinquante ans plus tard, comment est perçu le MLF par la nouvelle vague féministe ? « Ce sont des femmes qui ont ouvert la voie avant moi. Et j’essaye de continuer leur combat », explique Coline Charpentier, jeune féministe à la tête du compte Instagram T’as pensé à. « Leur histoire m’intéresse par la façon dont elles ont structuré leur mouvement, la place donnée aux débats, la joie, et la sororité. Je trouve qu’on en a besoin pour continuer à lutter aujourd’hui. »
Un reportage de Morgane Moal. Photo de Une : Pierre-Olivier Chaput pour Radio Parleur.
Extraits sonores :