Ils sont une soixantaine de Gilets Jaunes, rassemblé.e.s ce dimanche 27 janvier, se tenant main dans la main sur le seuil du château de Versailles. Solidaires dans la lutte, pacifistes dans la bataille, les manifestant∙es cherchent à rester visibles et mobilisé∙es en réinventant la forme de leurs mobilisations. L’objectif est ambitieux : cinq chaînes humaines doivent traverser la France afin de converger au carrefour du roi soleil.
Dans les rues de Versailles, le jaune ne déferle pas en grand nombre, comme lors des grands jours de mobilisation. Sur la place d’arme, une soixantaine de manifestant∙es seulement se sont réuni∙es. Ils et elles viennent pour la plupart de Normandie, de l’Eure ou des Yvelines. Les minutes passent, et les regards se font de plus en plus fébriles : où sont les copains et copines des précédentes mobilisations ? Les téléphones chauffent pour battre le rappel des troupes. En vain, le temps passe et les rangs restent clairsemés. La chaîne humaine se met finalement en place et traverse la place. Si l’affluence n’est pas au rendez-vous, cette mobilisation est, pour ses participant∙es, une réussite : le symbole est là.
Une mobilisation au visage pacifié
C’est d’abord le vécu des précédentes mobilisations et la volonté de montrer un visage pacifique qui caractérisent cette action. Christophe Pitault nous explique que cette chaîne humaine porte « une revendication essentielle, l’arrêt immédiat de l’usage de toutes les armes intermédiaires par les forces de l’ordre. » La chaîne humaine, c’est la réponse à la répression violente et agressive qui touche le mouvement des Gilets Jaunes depuis ces débuts. Pour lui, il faut permettre à tous de pouvoir agir pour montrer leur solidarité avec la lutte engagée sans risquer d’être blessé ou inquiété par la police.
Cette longue manif main dans la main devait traverser la France depuis tout les points cardinaux, mais le préfet du Finistère, puis celui de Lille, les ont interdit. Le même jour, les Foulards rouges, manifestant∙es pro-macronistes, sortaient dans la rue pour soutenir le président et son gouvernement. La principale cause du manque d’effectifs aujourd’hui à Versailles : “ça a été difficile de relayer les infos et d’organiser des actions inédites en si peu de temps,” souligne l’une des co-organisatrices, au pin’s Gilet Jaune accroché sur son bonnet.
Les Gilets Jaunes ne mordent pas
Vanessa est venue avec ses enfants. Vétérante des traditionnelles manifestations du samedi, à Paris, elle s’y rend de moins en moins depuis quelques semaines. Par peur des violences, confie-t-elle. Pourtant, cette mère de famille s’enthousiasme « c’est l’occasion de faire participer mes enfants au mouvement, parce qu’ils nous voient très mobilisés. Ils sont contents d’être là. » Pour Melissa, jeune femme blonde de 21 ans venue avec ses ami∙es depuis Vernon, cette chaîne humaine montre aux gens qu’ils ne doivent pas avoir peur des Gilets Jaunes. Aucune morsure constatée.
Cette nouvelle forme de rassemblement vient compléter les autres formes actions qui caractérisaient jusque-là le mouvement des Gilets Jaunes : campements sur les ronds-points, blocages aux péages, manifestations déclarées, ou non. Pour les participant∙es, toutes les formes se valent, le tout est de rester actif et inventif. Des suites ? Les organisateur∙trices en prévoient déjà. L’idée d’une chaîne humaine pour les beaux jours, au mois de mai, est lancée. Et, cette fois-ci, grâce aux outils de communication développés et partagés entre Gilets Jaunes, Christophe Pitault entrevoit la possibilité de fédérer au-delà de l’Île-de-France.