A l’occasion de la sortie de son livre Le déchaînement du monde. Logique nouvelle de la violence (Éditions La Découverte), nous avons rencontré François Cusset, historien des idées et professeur de civilisation américaine à l’université de Nanterre, des nouvelles luttes d’émancipation qui coagulent aujourd’hui dans les zones délabrées par le néolibéralisme.
Retour à la terre et refus du tabou de la violence ?
Une nouvelle étape du capitalisme est en cours : Uber, Facebook et autres applications nous ont « dé-civilisé » et transformé en « nouveaux sauvages » . Face à ce constat de nouveaux types de contestations émergent et se réapproprient la question de la violence, longtemps bannie dans nos sociétés dites civilisées.
Suite à quarante ans de refus au sein de la gauche et de l’extrême-gauche de la considérer comme une stratégie viable, une nouvelle génération brise le tabou de la violence : black-bloc, membres du cortège de tête, zadistes ou zapatistes sont, pour beaucoup, des inclassables qui refusent de défiler sous les bannières syndicales ou partisanes. Bien que toujours anticapitalistes, ils diffèrent de leurs aînés des années 1970 avec des luttes territorialisées : Place Taksim à Istanbul, Puerta del Sol à Madrid, Occupy Wall Street, Notre-Dame-des-Landes, Chiapas et autres espaces autonomes sont occupés et réinvestis. Étrangers aux lieux, ces révolté·e·s se démarquent d’un retour à la terre essentialisé, propre aux mouvements nationalistes-fascistes.