Relaxé.e.s. Aujourd’hui, près de dix ans après les faits, le tribunal de grande instance de Paris reconnaît deux échecs : le « groupe de Tarnac » n’a existé que dans l’imagination des policiers, et l’enquête tentaculaire n’a pas réussi à prouver quoique ce soit quant à la culpabilité des militant.e.s. Trois semaines de procès ont permis de décortiquer ces dix ans de procédures et de judiciarisation, feuilleton policier et politique entortillé autour du « péril rouge » tant redouté par le gouvernement Sarkozy.

L’ancien palais de justice de Paris sur l’île de la cité. Photographie : créative commons

Du comité à la cellule

Ils et elles étaient huit prévenus. Huit mis en cause dans le sabotage d’une ligne SNCF une nuit de novembre 2008. Huit personnes soupçonnées de faire partie du « groupe de Tarnac » une « cellule invisible » selon les mots du procureur de la République de l’époque, Jean-Claude Marin, « qui avait pour objet la lutte armée ». Confondant au passage les mots « cellule » et « comité », puisqu’il n’avait certainement pas encore lu « L’Insurrection qui vient » dudit Comité Invisible.

« C’est sûr, cellule, ça fait déjà beaucoup plus terroriste ! » David Dufresne, écrivain et journaliste qui a enquêté trois ans sur « l’affaire de Tarnac », a décrit lors de la dernière semaine d’audience « l’auto-intoxication » des services de police et de renseignement, la SDAT (Sous-direction anti terroriste) et la DCRI (Direction centrale du renseignement intérieur). Leurs agents ont travaillé dix ans sur le « groupe de Tarnac », utilisant les ressources de l’antiterrorisme, pour une affaire qui, en réalité, n’en relève pas : « les faits n’ont aucun intérêt dans cette histoire », assène David Dufresne.  

Le groupe de Tarnac est une fiction

La présidente du tribunal, Corine Goetzmann, a été patiente. Durant les trois semaines de débats aussi répétitifs qu’éprouvants, elle a souligné à plusieurs reprises les méthodes policières en contradiction directe avec la loyauté de l’enquête. Et aujourd’hui, elle a fermé la porte sur le pied de l’institution policière : « L’audience a permis de montrer que le groupe de Tarnac était une fiction ». Une « construction policière », avait déjà admis le procureur Olivier Christen lors de ses réquisitions.  

Christophe Becker tout de même condamné

Sur les huit prévenus, sept sont relaxés, faute de preuve de participation au sabotage en ce qui concerne Julien Coupat et Yildune Lévy. Pour les autres, poursuivis entre autres pour « association de malfaiteurs », point de condamnation non plus. Il n’en reste qu’une personne est tout de même condamnée : Christophe Becker, reconnu coupable de « recel de vol » de cartes d’identité et « tentative de falsification de documents administratifs ». Il a été condamné à quatre mois de prison avec sursis.