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Quartiers populaires et antiracisme politique : que faire ? Débat avec Omar Slaouti

A l’heure où des mobilisations importantes ont lieu (SNCF, services publics…), beaucoup s’interrogent sur un « mode d’emploi » pour mobiliser les quartiers populaires, ces grands absents. Est-ce une interrogation pertinente, si oui, pour qui ? Comment articuler questions sociales et questions raciales ? Omar Slaouti, militant antiraciste, est l’invité du Temps des Lilas.

Omar Slaouti au Lieu-Dit. Photo : Tristan Goldbronn pour Radio Parleur.

L’antiracisme n’est pas une question de morale mais de politique

Ce n’est pas une question de bons sentiments, mais de discriminations systémiques dont sont victimes les populations issues de l’immigration postcoloniale, discriminations combattues au quotidien par des militants antiracistes en permanence attaqués, y compris par des organisations se revendiquant du « camp progressiste ». Pourquoi et à qui l’antiracisme politique fait-il peur ? En quoi est-il porteur de transformations sociales ? Comment lutter contre ce racisme d’État ? Et, concrètement, aujourd’hui, dans les quartiers populaires, que faire ? C’est à ces questions que nous proposons de répondre ensemble, à partir de l’intervention d’Omar Slaouti.

Le constat est connu. Pourtant, il est peu, voire pas, pris en compte par les syndicats et partis politiques à gauche. S’il fallait une énième preuve pourtant, le rapport Borloo, qui utilise le terme de « scandale national », éclaire une dégradation effarante des conditions de vie dans les quartiers populaires avec des communes qui ont 30% de capacités financières de moins que les autres, moins de crèches, moins d’équipements sportifs, moins d’accès à la culture, moins de professeurs remplacés, moins de transports… Cette inégalité d’accès aux services publics de ceux qui en ont le plus besoin s’est encore aggravée avec la politique de Macron.

Une gestion policière fondée sur la discrimination raciale
Cette ségrégation économique et sociale se conjugue avec une gestion policière fondée sur la discrimination raciale : les contrôles aux faciès sont incessants – rappelons qu’un jeune Noir ou Arabe a vingt fois plus de chances d’être contrôlé qu’un Blanc, selon le Défenseur des droits –, le harcèlement, les humiliations, les brutalités exercés par des fonctionnaires de police qui ont tous les droits – y compris celui de tuer – sont le lot quotidien des jeunes des cités. Où en est un pays quand tous les fils d’une famille, celle d’Adama Traoré assassiné par la police, sont harcelés par cette même police, par la justice et emprisonnés ? Quand l’armée est déployée pour quadriller des quartiers d’Hénin-Baumont ? Où en est un pays quand des familles, dont les fils ont-été assassinés par la police, attendent en vain que la justice passe ?

« Abandonnés » de la République et « racisme d’État »
Face à certains qui parlent de territoires « abandonnés » ou « perdus » de la République, les militants de l’antiracisme politique dénoncent eux un « racisme d’État », une gestion « coloniale » des quartiers. Cette bataille des mots est une question politique. Le terme d’islamophobie pour désigner le racisme antimusulman n’a toujours pas droit de cité dans le débat politique. Pour avoir utilisé d’expression de « racisme d’État », Rokhaya Diallo a été éjectée du Conseil national du numérique. Et c’est au prétexte de ces mots-là, et des réalités qu’ils nomment, que ces militants subissent des campagnes de dénigrement systématiques organisées par la fachosphère, le Printemps républicain, une grande partie de la presse mainstream et par l’Etat, à son plus haut niveau. Le syndicat Sud Education 93, par exemple, est poursuivi par le parquet pour « discrimination » après avoir organisé un atelier en non mixité raciale, lors d’un stage syndical sur les discriminations.

Comment articuler questions sociales et questions raciales ?
A l’heure où des mobilisations importantes ont lieu (SNCF, services publics…), beaucoup s’interrogent sur un « mode d’emploi » pour mobiliser les quartiers populaires, ces grands absents. Est-ce une interrogation pertinente, si oui, pour qui ? Il y a urgence à débattre des réalités spécifiques vécues dans des quartiers ségrégués, des pratiques militantes de ce courant antiraciste qui ne font pas consensus à gauche afin de repenser la question de la « convergence des luttes » et des alliances stratégiques. Mais quel doit-être le prix de ces convergences auxquelles beaucoup aspirent ? Et qui paie ? Comment articuler questions sociales et questions raciales ? Quelles propositions concrètes pour lutter contre les discriminations judiciaires, les violences policières, l’islamophobie et tous les racismes ?

Les invité-es :

– Omar Slaouti, membre du collectif Justice et Vérité pour Ali Ziri,porte-parole de la Marche pour la dignité du 19 mars 2017et professeur de physique-chimie à Argenteuil.

Le Lieu-Dit
Le Lieu-Dit est un café littéraire et un lieu de conférences. Trois ou quatre soirs par semaine s’y déroulent des débats et des projections.

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